Le printemps prometteur du Jeu de Paume

Exposition Robert Adams au Jeu de Paume. Photo: Les Soirées de ParisSes photos valent beaucoup mieux que ses interrogations. Pour cette photo emblématique d’une exposition qui vient de commencer au Jeu de Paume, Robert Adams son auteur s’interroge : « Pourquoi faudrait-il n’ouvrir les yeux que dans des lieux restés vierges, comme les parcs nationaux » ?  A vrai dire il est permis d’éviter la question et de se soucier comme d’une guigne de l’éventuelle réponse.

Sa belle photo noir et blanc d’une maison américaine, prise à Colorado Springs, est réussie. Tout comme l’ensemble de sa production, attachante sans être pour autant spectaculaire, que le Jeu de Paume expose depuis le 11 février.

Ce photographe américain est né en 1937. Il commence comme prof d’anglais mais son intérêt pour la photo remonte à 1963. Et dès ses débuts, Robert Adams opte pour des petits formats représentant des routes, des paysages déserts, une chambre bien rangée réchauffée par la présence de soleil à travers les rideaux, un homme qui tourne le dos dans un café. Les atmosphères ne sont pas sans rappeler, la couleur en moins, celles de Edward Hopper. Inertes, figées, elles nous apaisent. On s’y sent comme dans un abribus au milieu de rien.

Photo de Robert Adams exposée au Musée du Jeu de Paume. Photo: Les Soirées de Paris

Robert Adams. Musée du Jeu de Paume. Photo: LSDP

Les humains sont pratiquement absents à une exception près. Car entre 1979 et 1983, il a photographié des habitants de Denver. Au Jeu de Paume cette séquence est intitulée « Nos parents, nos enfants » et l’on se dit qu’il est bien dommage que Robert Adams ne se soit pas davantage intéressé aux gens tant sa façon de les saisir force l’émotion. Mais ce choix de photographier des habitants de Denver est justifié par le photographe. Parce que c’est dans cette ville que sont fabriqués et assemblés les détonateurs qui servent à faire exploser les bombes atomiques. On n’est pas obligé de le savoir pour apprécier ses prises de vues. C’est à l’appréciation de chacun.

A l’étage du dessous figurent les œuvres de Mathieu Pernot, l’homme des expériences multiples au contraire de son voisin du dessus. Deux fois de suite, cet homme né en 1970 à Fréjus, oublie sciemment son propre appareil. D’une part pour saisir dans une cabine Photomaton des enfants bohémiens (minutieux autant qu’émouvant travail) et d’autre part pour nous montrer ce que peuvent donner des anciennes cartes postales agrandies soit dans leur intégrité soit à partir d’un détail.

Mathieu Pernot. Musée du Jeu de Paume. Photo: Les Soirées de Paris

Mathieu Pernot. Musée du Jeu de Paume. Photo: LSDP

Le procédé dans ce dernier cas n’est pas génial au sens propre du terme mais ce qu’il en ressort est intéressant. Se cachent souvent dans des images banales des détails remarquables. Il déniche, il scrute, il recadre, il agrandit et bien souvent le (bon) tour est joué. La trouvaille est jolie.

Grands ensembles que l’on fait imploser, intérieurs désertés de prisons, migrants qui dorment à même le sol dans des linceuls de fortunes, Mathieu Pernot conjugue son talent à travers différents types d’explorations et de matériels.

Cette double expo qui va durer jusqu’au 18 avril est un bon crû. Sur ce coup, le contrat est bien rempli.

Le Musée du Jeu de Paume.

 

PS: A noter qu’à partir du 8 avril, le Jeu de Paume présentera dans son espace virtuel (http://espacevirtuel.jeudepaume.org) une présentation du travail conjoint et a priori prometteur de Magali Daniaux et Cédric Pigaux sur les enjeux énergétiques et alimentaires. On y trouvera entre autres choses, cette image sur ce lieu insensé basé sur l’archipel norvégien de Svalbard ou un bunker enfoui dans le sol gelé enferme une bibliothèque des différentes semences terrestres. En cas de grisou.

Image emblématique de l'exposition à venir: "Devenir graine". Photo: LSDP

Le bunker de Svalbard. Image emblématique de l’exposition à venir: « Devenir graine ». Photo: LSDP

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