Le big bang à l’envers de la télé française

Les tout débuts de la télé mécanique. Photo: LSDPLes temps ne sont pas si lointains ou des générations ont assisté au débarquement de la télévision dans leurs foyers. Ceux-là, vaillants quinquas, sexas, octogénaires et davantage s’enthousiasmeront pour cette exposition sur l’histoire technologique de la télévision française organisée au Musée des arts et métiers. Emotionnelle et instructive, un peu désordonnée mais on comprend qu’il était difficile de tout tasser, cette expo fait mouche.

Passé quelques musiques de génériques positionnées à l’entrée, on tombe sur un chaos d’appareils retraçant les progrès technologiques de la téloche depuis 1935 jusqu’au Thomson Ducretet en couleur qui épatait, jusqu’à les rendre muets, les voisins des premiers acheteurs.

La télévision c’est quand même toute une épopée que les scénographes de l’exposition ont dû compresser en une sorte de big bang à l’envers. Mais on s’amuse sans conteste avec les choix retenus si l’on songe par exemple à ce dispositif qui permet à tout un chacun d’essayer en réel de présenter une carte météo. Se frotter à l’exercice rend tout de suite modeste.

Un des avantages de cette saga technologique est de nous inciter à réfléchir sur cette machine qui, allumée, a divisé environ par dix notre champ de vision. Et dans ce canal étroit où l’écran de télé nous coinçait, un fleuve de vie télétransmis charriait un flot d’émotions, d’âneries et plus rarement de culture, encore que sur ce dernier point la France ait été une des moins mal loties.

Un des premiers appareils de télévision aux Arts et Métiers. Photo: LSDP

Un des premiers appareils de télévision aux Arts et Métiers. Photo: LSDP

Le Musée des arts et métiers nous restitue quelques grands moments du petit écran comme l’attentat du World Trade Center, la famine au Biafra ou bien plus modestement Dominique Strauss-Kahn avouant avoir raté son rendez-vous avec les Français. L’Institut national de l’audiovisuel a fourni pour l’occasion toutes sortes de choses curieuses  comme revoir un Laurent Fabius tout jeune dans une émission littéraire de 1970, ou encore l’animateur Guy Lux exhibant son célèbre rictus dentaire. On en a pour son argent. Tout y passe dans l’esprit revival comme par exemple le générique de fin signé Folon qui jouait les marchands de sable pour petits et grands. On ne coupera pas non plus à l’inévitable bêtisier, recette très sûre, quand on ne plus comment faire en sorte que le chaland se gondole.

Traiter de la télévision française c’est forcément mal étreindre un sujet trop vaste. Que le Musée des arts et métiers ait logiquement pris comme point de départ l’aspect technologique a permis de développer une arborescence scénographique à peu près cohérente.

Depuis que la transmission se banalise à travers de multiples supports, d’une certaine façon depuis que la télé s’est suffisamment miniaturisée pour quitter nos salons et entrer dans nos poches, bientôt dans nos lunettes et probablement un jour sous notre peau,  on peut ne peut que déplorer cette civilisation de l’écran qui diffuse en continu ce qui se passe largement ailleurs tout en masquant notre environnement immédiat y compris celles et ceux qui nous côtoient. L’histoire n’est pas encore écrite qui nous révèlera bien un jour ce qu’il en adviendra. On parle de télé-transportation, un système en chemin inverse qui vous permettrait par exemple de vous promener dans les rues de Fallouja tout en restant à l’abri des balles, ce que font déjà les pilotes de drones entre parenthèses.

Aspect de l'exposition "Une sage de la télé française" aux Arts et Métiers. Photo: LSDP

Aspect de l’exposition « Une sage de la télé française » aux Arts et Métiers. Photo: LSDP

Cette « Saga de la télévision française », visible jusqu’au 8 mars 2015, nous invite sans le dire à se méfier de ce qui nous éloigne.

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2 réponses à Le big bang à l’envers de la télé française

  1. legendre nathalie dit :

    Cher Philippe, bel article (comme à ton habitude) pour une des avancées technologiques qui a le plus révolutionné notre génération …mais cela va plus loin et donne envie de ne pas rater l’expo !
    Nathalie

  2. de FOS dit :

    Ah Folon et son hypnose… Je baille déjà !

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