La vie avec ou sans sourcils de la princesse Kaguya

Image extraite du "Conte de la princesse Kaguya"Tombée de la lune dans une bambouseraie, la future princesse Kaguya est recueillie par un couple de paysans qui la choient. Entièrement réalisé au fusain et à l’aquarelle, « Le conte de la princesse Kaguya » nous charme sans trop de peine. Mais nous rappelle, au bout de deux heures et dix sept minutes de projection que nos salles doivent gagner en confort pour amortir les temps additionnels.

Le film de Isao Takahata, compagnon de route de Hayao Miyazaki (ils ont fondé tous les deux le studio Ghibli en 1985) est un bien joli moment de poésie. Sans doute parce qu’elle ne verse pas dans la facilité, cette adaptation d’un vieux conte japonais du dixième siècle ne risque pas un tabac planétaire. Au MK2 Gambetta, la salle qui lui est dévolue peut accueillir quelques familles sans plus.

Cette petite princesse débarque bébé dans une pousse de bambou et, à l’instar de la plante, elle évolue très vite. Le paysan qui l’adopte avec sa femme a dans l’idée qu’elle sera une grande princesse et qu’il en tirera prestige et profit.

Isao Takahata nous fait quelquefois passer sans crier gare du film pour enfant dont la poésie de ses colorations pâles charme aussi bien les grands, à des accélérations oniriques qui nous captent comme si l’on avait avalé une drogue hallucinogène. Au détour des parfois longues phases aimables, il y a ces échappées inattendues qui nous réjouissent en nous emportant loin dans le sillage de la princesse Kaguya.

Image extraite du film

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Ce n’est pas facile de devenir une princesse dans le Japon ancien. Il faut apprendre à être sage et se faire entièrement épiler les sourcils avec une pince. Leur emplacement sera teint en noir de même que les dents, ce qui déclenche chez Kaguya quelques réflexes de révolte, elle qui aimait tant la vie de petite paysanne affranchie.

Pour se distraire dans sa maison de princesse, elle apprend à jouer du Koto, un instrument de musique à cordes pincées. Il en sort des notes particulièrement délicates et réconfortantes pour la jeune fille brimée. Elles nous signalent que Joe Hisaishi le précieux compagnon de musique de Miyazaki est à la manoeuvre pour la bande son de la princesse Kaguya.

Tombée de la lune, Kaguya sera récupérée par ses pairs, venus sur terre portés par un nuage. Ce film fonctionne avec les ressorts de la séparation. Kaguya doit d’abord quitter ses petits compagnons de jeu pour monter à la capitale et à la fin s’arracher radicalement de l’astre qui l’avait accueillie. Quand sa mère d’adoption le comprend, elle étreint celle qui est devenue une jeune fille et lui dit qu’elle peut « encore » la tenir dans ses bras. Isao Takahata fait peser son talent sur ces ultimes instants où tout est encore tangible. Quand le cœur brusquement s’affole en raison d’une disparition qu’il comprend imminente.

La princesse s’en est allée mais il nous reste son film.

Le conte de la princesse Kaguya. Image extraite du film

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Une réponse à La vie avec ou sans sourcils de la princesse Kaguya

  1. Frédéric MAUREL dit :

    Vu il y a quelques jours à Lyon / j’ai beaucoup aimé la grande puissance de ce conte à rebours et une jeune fille de mon entourage était en larmes à l’annonce de l’arrachement, mais deux adultes plus âgés que moi se sont ennuyés pendant 2 heures et ont glo(us)sé, notamment sur le caractère « hénaurme » de la scène finale, avec le char et l’escalier sortant des nuages. Bref, un film qui n’a laissé personne indifférent !

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