A l’origine était Lutèce

L'afficheParis ne s’est pas fait en un jour dit-on. Pas même en un siècle, ni un millénaire, d’ailleurs. La preuve sur scène, rue des Mathurins. Vaste programme, donc. Le défi est relevé avec panache, le spectacle plaisant. La pièce souffre pourtant de deux défauts majeurs, commençons par tenter de les évacuer, pour mieux apprécier la suite. Tout d’abord, le titre. « Ne pas donner à manger au conférencier ». Si ma voisine de 7 ans, qui a « très bien aimé » la soirée, a bien compris que lorsque le personnage mange, il s’endort, comment un tel titre peut-il attirer l’attention bienveillante d’un nombre conséquent de spectateurs, spectateurs quotidiennement sollicités par mille affiches, colonnes Morris et autres réclames ? Vous me direz avec raison qu’il y a Les Soirées de Paris et sa sélection approximative, subjective, fragmentaire (en ce qui concerne les billets de votre serviteur). Ce n’est pas suffisant. Pas encore.

Il s’agirait donc de ne pas donner à manger au conférencier, celui-là même qui est l’unique personnage de cette pièce destinée à l’édification des masses concernant l’Histoire de Paris. L’Histoire moyenâgeuse avant tout. Le comédien (Erwan Creignou, motivé) joue donc le conférencier, et le nourrir l’endort. Donc s’en priver, le priver. Sauf que cela nous amène au second défaut. Voilà qu’après une heure pile le bougre a mangé et s’endort. Une heure, ce n’est pas exceptionnel, cela arrive fréquemment. A gesticuler et causer comme il le fait sans presque s’arrêter, le conférencier a le droit syndical au repos d’une journée après une heure de labeur. Sauf que du point de vue du spectateur ayant réglé plein tarif à 32 euros, ça ne peut pas passer. Vous ne manquerez donc pas de dénicher un tarif plus abordable, vous savez comment (allez-y de la part des Soirées de Paris, on ne sait jamais), car cela en vaut la chandelle.

Ouf, passons du côté lumineux du spectacle. Avec un premier point fort de haute volée : voilà un spectacle vraiment familial, de 7 à 77 ans comme on disait dans le temps. Ce qui n’était pas couru d’avance au vu du sujet. Avec humour, la conférence nous embarque dans une folle cavalcade, de Lutèce à Saint-Louis, des Templiers à Saint-Denis. Il y a le vieux projecteur de diapositives, les vieilles cartes scolaires, le tableau noir et la craie, les Playmobil et la lampe de poche. Tout cela est bricolé avec ingéniosité, et on se prend au jeu. C’est ringard mais tellement sincère, sans esbroufe, farfelu. Mais certifié authentique historiquement (quand bien même mon voisin de 9 ans a bien eu un doute sur la période des invasions barbares, figurant à son programme de CM1).

Certes, l’équipe aux commandes a de la bouteille, l’un des auteurs, Sacha Danino notamment faisant partie des aventures remarquées « Mission Florimont » ou « Le tour du monde en 80 jours ». On apprend donc beaucoup de choses (pour les agrégés d’Histoire médiévale, faut voir, j’en connais certes qui passent des nuits sur les tisserands bordelais au 12e siècle), on redécouvre dans la bonne humeur l’Histoire de la plus belle ville du monde. Au passage le conférencier ne manque pas de réhabiliter le Moyen-Age. Ce n’est que justice. Cela donne une furieuse envie de partir à la redécouverte de la cité. Apprendre en s’amusant, quel privilège tout de même.

Byam

Direction la rue des Mathurins

"Ne pas donner à manger au conférencier" .Source image: Théâtres des Mathurins

« Ne pas donner à manger au conférencier » . Source image: Théâtres des Mathurins

 

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Une réponse à A l’origine était Lutèce

  1. Anne Archen Bernardin dit :

    Nous voila revenus dans les années 60.. Le matériel pédagogique paraît totalement dépassé mais cela fonctionne très bien, comme les gadgets de Pif Gadget d’ il y a longtemps!!! A nous alors les simplissimes maquettes et cartes car le conférencier nous attrapent par le coin de l’envie de faire simple et de comprendre, sans gadgets Hi tech!!! Laissons bricoler nos petits avec des jeux modulaires de constructions en formes de briques et autres jeux avec engrenages et boulons!!! C’est ainsi qu’on stimule les neurones et pas les cellules grises, qui maternent les premières mais n’interviennent pas directement dans le phénomène de travail des aires du cerveau… Désolé, Hercule, mon ami dont les fameuses moustaches ont le droit d’être cirées, taillées avec amour et une petite paire de ciseau, et emballées dans un somptueux pyjama à moustaches!!!, Désolé, donc Hercules mais tes petites cellules grises ne jouent pas le rôle déterminant que tu eus l’erreur de leur prêter… Les neuro-sciences ont progressé depuis tes citations enflammées!!
    Donc allons voir ce spectacle qui nous donnera envie d’ être un nouveau Professeur Tournesol ou autre savant fou génial… Notre Recherche fondamentale a besoin d’être encouragée, félicitée et aimée… Donc…

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