Comment être encore féministe en 2015 ?

Source: Google imagesOn ne peut plus en 2015 être féministe comme au temps de grand-maman ou plutôt de grand-papa. C’est tout le talent de Johanna Luyssen  de répondre dans un livre à cette question que nous nous posons toutes et tous à savoir : « Comment être encore féministe en 2015 ?  » Ce terme « féministe » a -t il encore un sens de nos jours ? Pour cela, elle va nous dénicher des féministes improbables, ceux et celles que l’on attendait plus.

Exit donc Olympe de Gouges, Simone de Beauvoir, Simone Weil ou autres dinosaures. Voici les obscurs, les sans-grade, les incompris ou les oubliés de l’Histoire ceux ou celles qui ont fait preuve de courage ou  d’audace, en leur temps, tout simplement.

Le courage de James Conolly qui, le lundi de Pâques 1916, à la tête des insurgés proclame la naissance de la république d’Irlande et le même jour accorde le droit de vote aux femmes…. lequel droit ne viendra en Grande Bretagne qu’en 1928 et en 1945 en France.
Au nom de toutes les femmes, bravo James.

Celui de Jimmy Carter qui après avoir quitté la maison Blanche sous les huées, est devenu le meilleur ex président des Etats Unis et a reçu le prix Nobel de la Paix. Dans son livre « A call to action : Women, Religion, Violence and Power », il  compare la ségrégation raciale à l’assujettissement des femmes par les hommes.
Au nom de toutes les femmes, merci Jimmy.

Le courage aussi de Lucien Neuwirth qui défendra sa loi sur la contraception promulguée le 28 décembre 1967 au grand dam de ses détracteurs comme Jean Coumaros, député de Moselle: « Les maris ont ils songé que désormais c’est la femme qui détiendra le pouvoir absolu d’avoir ou de ne pas avoir d’enfants..Les hommes perdront alors la fière conscience de leur virilité féconde et les femmes ne seront plus qu’un objet de volupté stérile. »
Au nom de toutes les femmes, merci Lucien.

Celui enfin de la grande championne de tennis Billie Jean King qui le 20 sept 1973 à Houston- Texas,  met une raclée mémorable à Bobby Ring, une ancienne gloire du tennis des années 40 et macho notoire qui avait eu l’outrecuidance de déclarer avant le match « BJK ne vaut pas tripette devant moi, le tennis féminin est bien en dessous du tennis masculin« . Apres BJK l’égalité des salaires des joueurs et des joueuses régnera dans le tennis mondial.
Au nom de toutes les femmes merci Billy Jean.

L’audace de Marthe Hanau, la banquière scandaleuse et controversée des années folles qui, un jour de 1925, se déguise en homme avec costume et barbe postiche pour pouvoir entrer dans le Palais Brongniart interdit aux femmes (ce qui sera le cas jusqu’en 1967).
Bravo Marthe.

Au fil des pages, Johanna Luyssen dessine ainsi les nouvelles  frontières, les nouveaux codes  du féminisme d’aujourd’hui :  Alors que dans les années 70 les féministes étaient plutôt intello et austères, désormais « féminisme » est  compatible  avec glamour : celui de Nicki Minaj la reine des shows hypersexualisés et de la danse des fesses, le « twerk » qui, comme Marilyn Monroe en son temps,  utilise son hyper sensualité comme moyen et non l’inverse. Et c’est là toute la différence.
Bravo Marilyn et Nicky.

L’auteur nous enchante avec ses parti pris délibérément en marge, son humour, son style mordant qui n’est pas avare d’anecdotes plus croustillantes les unes que les autres.  Un coup de chapeau au choix de l’éditeur d’illustrer le texte avec les graphismes d’Enora Denis. L’originalité de la forme souligne l’originalité du propos.

Marie-Pierre Sensey

« Les 30 féministes que personne n’a vus venir »  Johanna Luyssen,  Editions Contrepoint. Mars 2015.

Etats généraux du féminisme en 1929. Agence Meurisse. Source Gallica

Etats généraux du féminisme en 1929. Agence Meurisse. Source Gallica

 

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3 réponses à Comment être encore féministe en 2015 ?

  1. de FOS dit :

    …Et bravo à celle qui nous donne l’envie de lire l’ouvrage !

  2. Frédéric MAUREL dit :

    que personne n’a vu (sans « s ») venir, non ?

    • En fait cher Frédéric Maurel, j’ai eu le même doute que vous tout en me disant que l’auteur et le correcteur du livre avaient bien dû travailler la question. Et d’après mes vérifications, le « s » s’impose. PHB

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