Memento Park à Budapest : le communisme dans tous ses états

Les bottes de Staline. Copyright: Lottie BrickertDans la banlieue sud de Budapest, Memento Park est un parc d’attraction d’un genre un peu particulier. Impossible de manquer l’arrêt si on s’y rend en transports en commun. Il suffit de scruter l’horizon. On est parvenu à destination quand on voit poindre au loin une paire de bottes gigantesques reposant sur un socle très haut. Les bottes de Staline. C’est tout ce qui reste de la statue de 10 mètres de haut, montée sur un piédestal presque aussi haut, qui se trouvait autrefois dans le parc Városliget à Budapest. La statue a été déboulonnée lors de la révolution de 1956.

Le thème de Memento Park, parc d’attraction de plein-air, est en effet le communisme. Plus un lieu de souvenir qu’un parc d’attraction. Un souvenir qui se veut heureux, la chute du régime tyrannique.

Baptisé  » le Cimetière du communisme » par les Hongrois, le « Parc des statues » avait ouvert dès 1993. Conçu pour abriter les statues déboulonnées en 1989, au lendemain de la chute du régime, et celles enlevées par la mairie de Budapest en 1991, il est aussi le sanctuaire des restes des statues déboulonnées en 1956.

En 2006, pour célébrer le cinquantenaire de la Révolution de 1956, le cimetière des statues s’est agrandi en développant d’autres attractions. Coup de marketing? Le parc a été débaptisé et est devenu « Memento Park ». Bien lui en a pris. Depuis sa transformation, ce lieu quelque peu paradoxal fait partie des sites touristiques les plus visités. S’il fait les yeux doux aux « ostalgiques » (NDLR : nostalgiques de l’est ou Ost en allemand), le parc est parfois décrié par des Hongrois. Ils regardent d’un œil courroucé les touristes se divertir en posant devant les statues colossales symboliques de la tyrannie vécue par le pays.

Laissons-là la controverse. Le parc permet – et notamment à ceux qui ont eu la chance de ne pas avoir vécu sous le joug d’un tel régime – de se familiariser davantage avec divers aspects du communisme tout en passant une agréable après-midi.

La trabant, une fabrication de la DDR. Photo et copyright: Lottie Brickert

La trabant, fabrication de la DDR. Copyright: Lottie Brickert

A l’entrée du musée, une Trabant bleu vif, la voiture populaire par excellence fabriquée en Allemagne de l’est, est à la disposition des visiteurs pour une séance de shooting. Plus loin, une cabine téléphonique permet d’écouter des discours de Lénine, Staline mais aussi d’autres leaders communistes comme Mao et Che Guevara.

Puis, on débouche sur le « cimetière » des statues. Monuments allégoriques à la gloire du parti, personnalités politiques, héros de la révolution ou soldats, le parc regroupe 42 statues colossales, des pièces artistiques maitresses conçues de 1945 à 1989. Lénine, Marx, Engels, … ils sont tous là. Pour mieux savourer la visite, il s’avère utile d’acheter le petit livre vendu à l’entrée qui retrace l’histoire des différentes oeuvres.

Le parc des statues. Photo et copyright: Lottie Brickert

Le parc des statues. Copyright: Lottie Brickert

Avant de quitter le site et d’aborder la seconde partie de la visite, on ne peut éviter le Red Star Shop, la boutique de souvenirs dont le micro diffuse des marches révolutionnaires hongroises et soviétiques. Livres, tee-shirts, DVD, reproductions d’affiches d’époque, mugs à l’effigie de Lénine, médailles, … avouons qu’il y a de quoi craquer et remplir son caddy devant le rétro devenu tendance!

A la sortie du parc, deux baraques en bois évoquent le goulag. Tout faux ! Il s’agit en fait de répliques d’anciennes baraques militaires installées là en 2006. Elles abritent des expositions temporaires et des photos de la Révolution de 1956 et 1989-1990. On peut d’ailleurs y voir certaines statues du parc dans le contexte d’époque. Il est dommage que la plupart des touristes se contentent de visiter le parc aux statues. Ils manquent un must : les films sur les méthodes d’entraînement des agents secrets dans la Hongrie communiste, diffusés dans l’une des baraques. Les services secrets et les ministères afférents avaient leurs propres studios de création qui ont produit des centaines de films de 1956 à 1988. En 2004, le réalisateur Gabor Zsigmond Pap a visionné et découpé des kilomètres d’archives pour concevoir ce film sur les agents secrets hongrois. En une heure, on apprend tout sur les méthodes de recrutement des agents et des taupes, la façon de dissimuler des micros et de fouiller les logements, l’importance du networking… Ce film, édifiant, ne manque pas d’humour. Il vaut presque la visite de Memento Park à lui tout seul !

Lottie Brickert

Memento Park – Balatoni road – Szabadkai street corner – 1223 Budapest
Horaires : Ouvert tous les jours de 10:00 à la tombée de la nuit – Entrée : 4500 HUF (14 €), y compris la navette aller-retour qui part du centre de Budapest ou 1500 HUF (4,7 €) si on accède par les transports en commun (très facile).

Le parc des statues. Photo et copyright: Lottie Brickert

Le parc des statues. Photo et copyright: Lottie Brickert

Print Friendly, PDF & Email
N'hésitez pas à partager
Ce contenu a été publié dans Histoire, Jardins. Vous pouvez le mettre en favoris avec ce permalien.

3 réponses à Memento Park à Budapest : le communisme dans tous ses états

  1. Intéressant et amusant!
    Un peu étrange tous ces films sur les méthodes d’entrainement des services secrets hongrois….pourquoi les avoir gardés et non pas détruits?

    • Lottie dit :

      Merci de votre commentaire !
      Personnellement, je suis contre la destruction de ce qui un jour peut servir de preuve de l’absurdité d’un régime et montrer comment un petit rien suffisait à faire interner voire disparaitre des personnalités ou de simples citoyens.

  2. Raymond dit :

    Chausser les bottes (de sept lieux?) de Staline, monter à bord d’une Trabant pour un shooting, acheter un petit livre (rouge?) à l’entrée pour savourer la visite d’un « cimetière » de statues… Belle incitation pour visiter « l’Ostalgik-land » de Budapest !

Les commentaires sont fermés.