Le musée-vaisseau des Confluences a pris son envol à Lyon

Le musée des Confluences. Photo: Valérie MaillardLe musée des Confluences, qui a fêté sa première année d’existence le 20 décembre dernier, porte bien son nom. Muséum d’histoire naturelle et des sociétés à vocation « distrayante et artistique », il se place aux « confluences des savoirs » dont nous disposons à ce jour sur l’Homme (ici interrogé à travers quatre thématiques : les origines, les espèces, les sociétés et la mort) et se situe géographiquement au confluent du fleuve Rhône et de la rivière Saône, ouvrant la porte sud de la ville de Lyon à la façon d’un vaisseau spatial posé sur son train d’atterrissage.

Le musée des Confluences est l’héritier direct du musée d’histoire naturelle Guimet de Lyon et en a repris les collections qu’il devra encore enrichir. Il fait par ailleurs l’objet de dépôts et de prêts de la part de musées ou d’institutions pour ses espaces d’expositions temporaires et permanentes. En mai 2011 il s’est vu attribuer l’appellation de musée de France, un label qui regroupe les établissements français dans la perspective d’un grand service public muséal. Le musée des Confluences est géré par la métropole de Lyon.

Tout d’Inox et de verre paré, il était censé symboliser à sa conception, en 2001, l’entrée de la ville de Lyon dans le XXIème siècle. Presque quinze ans et de nombreuses polémiques plus tard (liées à des retards de construction et des coûts de construction multipliés par cinq), il semble avoir enfin pris de l’altitude. 825.000 visiteurs ont été dénombrés au 15 décembre 2015 (chiffres du musée des Confluences). Une première enquête de satisfaction, menée par l’Observatoire permanent des publics du musée entre juillet et septembre 2015, a révélé l’adhésion des visiteurs à 93%.

Au début pourtant, ça n’était pas gagné. En 2001, Coop Himmelb(l)au, le cabinet d’architecture autrichien qui remporte le concours international, soumet un projet d’architecture de type déconstructiviste basé sur la présence d’importants porte-à-faux. Le signe de reconnaissance de ce cabinet qui s’est illustré par de nombreuses réalisations, dont le siège munichois de BMW ou l’immeuble de la Banque centrale européenne de Francfort.

Vue partielle du musée des Confluences. Photo: Valérie Maillard

Vue partielle du musée des Confluences. Photo: Valérie Maillard

« Mégalo », « éléphantesque », « un dinosaure » pouvait-on entendre au fur et à mesure de l’édification du bâtiment et jusqu’à son achèvement. Idem dans la presse qui relevait régulièrement les dérapages financiers, comme Sorj Chalandon qui signa dans « Le Canard » un article intitulé « Pharaon au pays de Guignol » (1). Sans parler des Lyonnais qui ont vu une structure d’acier enlaidir l’entrée de leur ville pendant plus de dix ans et la note s’alourdir pour leur collectivité.

Un an après l’ouverture, cette époque paraît loin. Des jardins ont remplacé la friche piétonne qui conduisait les promeneurs du dimanche jusqu’au confluent des deux cours d’eau. Enfants, ils aimaient s’amuser de la différence de couleur des flots se mélangeant (le Rhône plus noir et la Saône plus bleue – on en tirait même des cartes postales !). Aujourd’hui, on s’y promène encore. Et l’on peut désormais contempler le fameux vaisseau, bien campé sur ses piliers extérieurs, prêt à décoller comme le Faucon Millenium de Han Solo. Métal côté sud (le « Nuage », qui abrite les salles d’exposition sur deux niveaux), verre côté nord (le « Cristal » point d’attraction du projet et surtout entrée principale du musée). Le nuage, ce sont 17.000 plaques Inox, 11 verrières et 600 panneaux photovoltaïques. Le Cristal, haut de plus de 30 mètres, est constitué d’une charpente primaire et d’une charpente secondaire qui supporte les vitrages. L’ensemble abrite un socle, qui concentre les ateliers de production, les auditoriums et les espaces d’accueil des groupes. Le tout est vraiment impressionnant.

On regrette quelque peu néanmoins que l’espace réservé aux salles d’expositions permanentes soit nettement moins ambitieux que l’architecture du bâtiment. En dépit des 1900 mètres carrés qu’elles totalisent, elles paraissent exigües en regard de l’ampleur du lieu.

On compte au niveau 1 un espace d’expositions temporaires (5 salles) et au niveau 2 un espace d’expositions permanentes (4 salles thématiques). La première galerie explore les origines de l’univers et de l’Homme, une autre interroge la place de ce dernier parmi les espèces animales, une troisième la structuration des sociétés, tandis que la dernière invite à réfléchir à l’éternité. Si l’ensemble est plutôt sombre car les salles sont peintes en noir, les objets présentés et la scénographie sont convaincants.

On s’arrête un moment face à un groupe de femmes figurants nos ancêtres Sapiens et Néandertal avec l’émotion de l’humain en quête perpétuelle de ses origines. Que nous évoque ces statues de cire ? Rien de précis, mais l’émotion surgit Plus loin on apprend qu’un paisible mammifère marin, la rhytine de Steller – sorte de petite baleine venue du fond des âges –, a disparu en moins de trente ans au XVIIIème siècle du fait de l’Homme qui avait découvert l’intérêt de sa viande et de sa graisse. Et de se sentir concerné davantage encore par l’impact de nos activités sur la planète… effet COP21 garanti.

"La cloche" (1967), Jean Tinguely. Photo: Valérie Maillard

« La cloche » (1967), Jean Tinguely. Photo: Valérie Maillard

Enfin, et pour ceux qui ne sont pas venus que pour la richesse du fonds de ce musée d’histoire naturelle, l’espace des expositions provisoires est un point d’attraction fort. Actuellement, et jusqu’au 24 janvier, se tient l’exposition « L’art et la machine ». Tous les savoirs ont toujours intéressé les artistes posent comme postulat les organisateurs de cette intéressante exposition. Ainsi, l’histoire de l’art ne peut pas tout à fait être séparée de celle de l’évolution des sciences et des techniques. « C’est fini, la peinture. Qui ferait mieux que cette hélice ? », interrogeait Marcel Duchamp, l’inventeur des ready-made qui ont une influence considérable sur l’art au XXème siècle. Ici, des œuvres de Claude Monet, Fernand Léger, Francis Picabia ou Jean Tinguely viennent questionner le visiteur sur son propre rapport aux machines. La visite se déroule en famille car l’exposition est ludique et récréative pour les petits comme pour les grands. Un détail vient tout de même gâcher la fête : les murs noirs (encore ?) des premières salles empêchent une bonne visibilité, quel dommage !

Valérie Maillard

(1) « Le Canard enchaîné » du 17 décembre 2014.

Musée des Confluences, 86 quai Perrache, 69002 Lyon.

Vue globale du musée des Confluences. Photo: Valérie Maillard

Vue globale du musée des Confluences. Photo: Valérie Maillard

 

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