On se retrouve à 13 heures au Wepler

Il y a d’abord ces luminaires merveilleux d’équilibre spatial et les ombres de Picasso, Apollinaire, Toulouse-lautrec, Marie Laurencin, Suzanne Valaton,  Utrillo, Carco, Dorgelès… que l’on guette il faut bien le dire sans succès.

L’une des plus vieilles brasseries parisiennes est un rendez-vous bien commode pour nombre de parisiens. Il suffit de dire « on se retrouve au Wepler à 13 heures » et n’importe quel parisien bien né n’a pas besoin de demander l’adresse à son interlocuteur. C’est bien simple, sans le Wepler place de Clichy, c’est la désorientation assurée, tout un équilibre qui se déglingue. Les origines de cette brasserie remontent au début du 19e siècle et les épreuves du temps n’ont pas eu raison de ses fondations.

Un poète de la grande époque, Laforgue, qui n’aimait visiblement par les formules conventionnelles préférait dire « je suis dégoûté des fraises des bois », à la place de « j’ai le cafard ». Et plutôt que la narration d’une désillusion, il préférait annoncer: « on ne peut plus s’asseoir, tous les bancs sont mouillés ». Bref rien de tel qu’un banc d’huîtres au Wepler lorsque l’on ne peut plus avaler une seule fraise des bois.

Mais le plat du jour ce mardi d’hiver était sous cloche, un bœuf braisé aux carottes, goûteux en diable et parfaitement cuit. La douceur de vivre se savoure mijotée. Deux clafoutis à l’ancienne accompagnés d’un sabayon pour conclure et l’après-midi s’entrevoyait autrement. L’addition était très raisonnable, soit 48 euros à deux avec une grande bouteille d’eau minérale et un café noisette (0,30 euro la goutte de lait quand même).

A la table voisine, deux dames soupiraient d’aise. En subtilisant leur addition laissée sur la table, nous avons appris qu’après deux coupes de champagne, elles s’étaient apparemment régalées d’un plat d’huîtres, d’un filet de julienne, d’une andouillette et deux cafés. Le standing de leur programme n’était pas le même que le nôtre mais elles n’ont écopé que pour 78 euros d’addition.

 Toutes les grandes brasseries ont leur jour de faiblesse mais ce n’était pas le cas ce midi là. Et tant que l’on pourra se retrouver « à 13 heures au Wepler » autour d’un bœuf braisé aussi bon, c’est que les temps ne seront toujours pas venus.

Le site du Wepler.

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