Somewhere, une jeune vierge perdue quelque part dans la translation

Il est difficile de distraire en filmant l’ennui. Se faire l’avocat du dernier film de Sofia Coppola, Somewhere, n’est pas moins compliqué tellement le film aurait également pu s’appeler « nowhere » ou encore « dead end ». Et pour décourager toute tentative de défense de Somewhere, voici les mots et expressions entendus à la volée après le générique de fin, dans la salle et sur le trottoir : « c’est nul », « c’est l’arnaque », « y’a pas d’histoire », « on aurait mieux fait d’aller voir xx au moins on se serait marrés ».

Sûrement que Somewhere partait avec un handicap. Car, et c’est bien légitime, les spectateurs s’attendaient à retrouver l’emprise psychologique de « Virgin suicides », les fastes de Marie-Antoinette ou la touche magique de « Lost in translation ».

L’histoire est frêle. Une star de cinéma s’ennuie dans son hôtel. Sa fille de 11 ans, Cléo, lui rend visite. Elle lui fait réaliser le vide de son existence. Clap de fin pour une jeune vierge perdue quelque part dans la translation.

Bon, s’il y a encore des lecteurs à ce niveau de critique, sachez que ce film, a néanmoins la vertu d’un travail documentaire sur le milieu américain du show-business. L’ennui et la décadence y décapent les humains. De ce point de vue, c’est bien rendu. C’est même surligné.

Dès les premières images le ton est donné puisque Johnny Marco tourne au volant de sa Ferrari sur une piste désertique entourée de sable. Il tourne et retourne et Sofia Coppola insiste tant sur les images que le ton est donné d’emblée.

Autre plan, Johnny Marco est dans son lit et deux filles s’échinent à l’émouvoir en pratiquant une « pole dance «  (danse suggestive autour d’une barre fixe) synchronisée. C’est moche, c’est vulgaire et Sofia Coppola s’applique à nous l’inculquer. Et comme les tours de piste en Ferrari, non seulement ça dure, mais ça revient dans une autre séquence, engendrant quelques symptômes d’accablement dans la salle de cinéma.

Il y a un court passage qui illustre bien le propos général et qui aurait pu faire une bonne chute : Johnny Marco est allongé sur un matelas pneumatique au milieu de la piscine de son hôtel. Le matelas dérive sur la droite et, petit à petit, Johnny et son matelas, que la caméra ne suit pas, sortent de l’écran.

Ce serait le bon moment pour quitter la salle car la fin ne vaut rien. Le personnage laisse sa Ferrari quelque part dans la campagne, marche devant lui et esquisse un vague sourire résurrectionnel, comme s’il avait retrouvé le sens de la vraie vie. Hum.

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