Courant alternatif pour les frères Dufy

C’est la saison des fratries et des retrouvailles. Alors que les visiteurs du musée Jacquemart André découvrent en ce moment même la production de Martial Caillebotte au côté de son célèbre frère le peintre Gustave Caillebotte, le musée Marmottan Monet copie-colle le procédé avec les frères Dufy, Raoul et Jean.

L’hédoniste Raoul tout le monde le connaît au moins pour sa gigantesque «Fée électricité», impossible à rater depuis 1937, pour tout visiteur du Palais de Tokyo. C’est même de là que vient l’idée du titre de l’exposition qui débute le 14 avril au Musée Marmottan Monet : «Complicité et rupture ». Complicité parce que malgré les 11 années qui les séparent, Raoul (1877/1953) et Jean (1888/1964) étaient naturellement proches et leurs œuvres, assurément cousines.

Et rupture parce que pour réaliser la fresque de 600 mètres carrés de la «Fée électricité» commandée en 1936 par la Compagnie parisienne de distribution d’électricité à l’occasion de l’Exposition Internationale de Paris, Raoul sollicite l’aide son frère Jean lequel, abandonnant pendant un an toute production personnelle, constitue l’indispensable documentation iconographique, notamment les portraits des savants.

Raoul et Jean Dufy – La Fée électricité (détail), in Raoul Dufy, Le Plaisir, 1937 – ©Adagp, Paris 2011

Et Raoul, lors la présentation de son œuvre à la presse, escamote la collaboration de son frère qui ne lui pardonnera jamais. D’autant que la «Fée électricité» sera qualifiée de plus grand tableau du monde et couverte d’éloges. La chronologie croisée des deux artistes mentionne néanmoins qu’à la mort de Raoul en 1953, Jean Dufy fait célébrer une messe à l’adresse de son frère.

Portrait de Jean Dufy, 1935 (c)Adagp, Paris 2011

Les années qui suivent, Jean exposera dans plusieurs galeries importantes aux Etats-Unis ainsi qu’au Canada. C’est en 1964 qu’il décède à son tour peu après la mort de sa femme, événement qui le bouleverse au point qu’il ne peut se rendre à ses obsèques.

Cette exposition s’annonce en tout point prometteuse  et accentue, comme l’indique Jacques Taddei, directeur du Musée Marmottan Monet, «l’identité stylistique propre à chacun». Une scénographie qui les singularise mais aussi qui les rapproche. Parmi les sujets communs figurent notamment les fenêtres ouvertes, le thème pictural lancé par Matisse et dont Raoul, lorsqu’il en commet, écrase sciemment tout effet de perspective.

Du 14 avril au 26 juin 2011 au Musée Marmottan Monet, 2 rue Louis-Boilly 75016 Paris. Métro Muette ou Boulainvilliers. Du mardi au dimanche de 10 heures à 18 heures.

Post-scriptum : Guillaume Apollinaire, qui avait qualifié Raoul Dufy de grand artiste méconnu, fait appel à lui en 1910 pour illustrer son «Bestiaire» de gravures sur bois, après dans un premier temps, avoir sollicité Picasso.

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Une réponse à Courant alternatif pour les frères Dufy

  1. de FOS dit :

    Te mesurer à moi, qui t’a rendu si vain ?…
    Quand on est « frère d’Art », mieux vaut exercer un métier différent… Chez les Caillebotte (Musée Jacquemart André), on ressent la complémentarité complice existant entre le peintre et le photographe ; chez les Dufy (Musée Marmottant), on note le jeu d’influences entre les deux frères et on mesure combien Jean a (injustement) pâti de la notoriété de son aîné Raoul, sa collaboration non reconnue à l’oeuvre magistrale « La fée électricité » achevant la belle entente de la fratrie…

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