Quand William Eggleston consacrait la banalité

Oeuvre de William Eggleston à la fondation HCB. Photo: LSDPC’est indéniablement l’un des signes qui consacre le bon photographe. William Eggleston a réalisé de très belles photos en décelant la beauté dans les sujets des plus ordinaires. A partir des années cinquante, cet américain né en 1939 a commencé à photographier tout autour de chez lui, d’abord avec un Canon télémétrique, ensuite avec son premier Leica. La première exposition de son passage à la couleur date de 1976. C’est le thème retenu par la Fondation Henri Cartier-Bresson jusqu’au 21 décembre.

Eggleston ne fait assurément pas dans le tape à l’œil. Mais lorsqu’il photographie un couple semblant fuir le parking d’un hôpital désert tout fonctionne et nous impressionne. Le sujet en lui-même mais aussi les flous, les perspectives, le cadrage enfin. L’idée nous touche.

En noir et blanc, il nous promène dans des lieux anonymes à commencer par la rue, les bars, les stations-service avec de ci de là quelques personnages parfois fugitifs, parfois d’une netteté indépassable, comme une jeune femme impeccable que l’on voit affairée à son bureau. Eggleston rend hommage à l’univers apparemment banal de nos vies en les transposant dans le rêve et la poésie.

Détail d'une photo de William Eggleston à la fondation HCB. Photo: LSDP

Détail d’une photo de William Eggleston à la fondation HCB. Photo: LSDP

Bien sûr l’on pourrait objecter que le juke-box où la station-service sont déjà des sujets fouillés et refouillés mais la signature de son objectif complète admirablement le travail déjà effectué par certains de ses pairs. Il y a aussi cette photo prise à l’écart d’une voiture traçant sous la pluie avec deux parasols au premier plan qui réjouit par sa composition éphémère.

Intitulée « From black and white to color », cette belle exposition répartie sur les deux étages de la fondation, nous accompagne sans problème vers cette transition chromatique. William Eggleston découvre avec la couleur de nouvelles possibilités de sujets. D’une simple aile arrière d’automobile, d’un pied de poteau et d’un bout de trottoir, il formule une composition graphique dont il résulte ce qu’il convient d’appeler une œuvre. A l’aise avec les coloris répartis au hasard de la vie il saisit avec justesse les ambiances particulières dont les lumières sont le premier auteur.

La chambre d’hôtel avec ses néons et sa pénombre, un garage avec un vélo au fond, un vieux poste de télé isolé dans un séjour, une femme qui marche seule dans la rue s’apprêtant à passer de l’ombre au soleil, et le tour est joué.

Aspect de l'exposition sur William Eggleston à la fondation HCB. Photo: LSDP

Aspect de l’exposition sur William Eggleston à la fondation HCB. Photo: LSDP

Lui qui « ne pouvait pas imaginer faire mieux que de parfaits faux Cartier-Bresson » a su mettre au point son propre au style en captant malgré tout ce qu’il pouvait y avoir de décisif dans ce que nous croyons être la neutralité absolue de nos univers anonymes.

Fondation HCB
2, impasse Lebouis
Paris 75014

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