L’aérogare se gare

aérogare des invalides. Photo: PHB/LSDPSa désuétude étant patente et ses sous-sols immenses, l’aérogare des Invalides ne pouvait échapper au vaste plan de réinvention de Paris. On sait depuis l’année dernière que c’est l’architecte Dominique Perrault qui a été choisi par la municipalité afin de remettre ce lieu vieillot aux normes de la mondialisation heureuse. L’auteur de la quadri-totémique BnF a du pain sur la planche. Comme l’indiquait le Journal du dimanche dans une édition datée l’année dernière, l’idée du promoteur est de transformer les aîtres en un espace d’exposition voué « aux métiers de l’art ». De fait l’aérogare devrait changer de nom pour « AéroGart », en soi tout un programme. Si l’on regarde la nomenclature des idées retenues, il faudra compter avec des choses à l’appellation étranges mais trendy comme des « corners », des « fablabs » , des salles pour des animations « ludopédagogiques » (comme quoi la novlangue a encore de beaux jours devant elle) et une salle de dégustation baptisée sans rire de l’acronyme « MIAM », soit « Marché des Invalides dédié à l’Alimentation Multigénérationnelle ». C’est dit. Continuer la lecture

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L’image presque introuvable

baty par kisling (détail)Geneviève Dormann (1) raconte que dans les premiers temps de l’automne 1918, Blaise Cendrars et Guillaume Apollinaire commentaient à la terrasse du père Baty, le défilé des corbillards transportant les corps des Parisiens frappés par la grippe espagnole. Maladie qui devait tuer Apollinaire quelques jours plus tard. Ce lieu névralgique, qui concentrait avec le Dôme, la Rotonde et la grande épicerie Hazard toute l’élite de l’art et de la littérature moderne, n’avait pas d’image. Cependant qu’il en existait une, découverte dans un livre de Billy Klüver (1927-2004), « A day with Picasso ». C’est un dessin (détail ci-contre), réalisé par Moïse Kisling en 1916. On voit sur son fronton, qu’en plus du bon vin célébré par Apollinaire dans « La femme assise », on y servait également des huîtres, ce qui est toujours le cas aujourd’hui mais sous une autre enseigne. Continuer la lecture

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La poésie dans le secret des atomes

Est-ce qu’il pensait déjà à cet ouvrage lorsqu’il décida de devenir éditeur ? On serait enclin à le penser. Le « Système poétique des éléments » que Dominique Tourte (éditions Invenit) vient de publier est le résultat d’une sorte d’utopie qu’il portait en lui sans doute depuis longtemps. L’entreprise n’est pas mince. Elle vise ni plus ni moins qu’à réenchanter le monde, le poétiser, jusque dans les domaines où on s’y attend le moins. La raison – ou le prétexte : les 150 ans du Tableau périodique des éléments chimiques, conçu par le Russe Dmitri Mendeleiev (1834-1907). Véritable génie, Mendeleiev avait notamment anticipé les découvertes postérieures en laissant quelques cases de son tableau vides, réservant aux futurs découvreurs le soin de les remplir. L’Unesco décida de faire de 2019 l’Année internationale de ce tableau. Continuer la lecture

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Dans la petite auto de Jiri et Miroslav

Il est toujours pleinement gratifiant de se lancer dans un tour du monde. Rien que l’idée en soi est toujours excitante. En 1947, deux étudiants tchèques, Jiří Hanzelka et Miroslav Zikmund se décident à franchir la frontière de leur pays. En astrophysique il est convenu d’appeler ce type de barrière virtuelle, l’horizon des événéments. C’est à dire l’endroit à partir duquel des choses nouvelles peuvent se produire. Durant quatre ans, ils vont effectuer leur périple, au volant d’une Tatra modèle 87. Ils découvriront de nouveaux peuples, de nouveaux modes de vie. Il se trouve que cette anecdote est d’actualité. Car pour la première fois, le constructeur de la marque Tatra, dont l’origine remonte à 1897, exposera son histoire au mois de février, à Paris, sous les ors du salon Rétromobile. Continuer la lecture

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Tribulation migratoire

l'odyssee d'hakimEn face mais loin, très loin, il y a l’île grecque de Samos et une seule lumière qui sert de repère. Il faut gonfler le canot, fixer le moteur et embarquer un réservoir supplémentaire. Hakim est sur la côte turque, son très jeune garçon dans les bras. Il se prépare pour la traversée nocturne avec d’autres migrants, pour la plupart Syriens comme lui. Il a avec lui le minimum, c’est à dire ses papiers, son argent et un peu de nourriture. Hakim s’est aussi procuré un gilet de sauvetage et seulement une bouée pour son fils car les gilets de sauvetage sont trop grands. L’équipée s’annonce d’une précarité redoutable. Le pilote est un migrant comme lui et n’a jamais conduit de bateau. Comme il le dit d’ailleurs, il a quatre heures pour apprendre, c’est à dire la durée théorique de la traversée. Ingénieur dans la vie civile, Fabien Toulmé est devenu auteur de BD. Il a décidé de raconter l’itinérance d’un migrant fuyant la guerre civile. Une narration qui pique parfois les yeux. Continuer la lecture

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Ah ces little women

C’est l’autre Greta du moment, non pas la petite prophétesse aux tresses, mais la scénariste-actrice-cinéaste américaine de trente-six ans nommée Greta Gerwig, qui défraye la chronique cinéma avec « Les filles du docteur March », nommé aux Oscars.
Surtout si vous êtes une femme, peut-être avez-vous versé vers quatorze ou quinze ans des torrents de larmes sur le sort de ces quatre sœurs.
En ce cas, vous n’aurez fait que suivre l’exemple de quantité d’Américaines de la seconde moitié du XIXème siècle qui avaient, elles aussi, versé tant de larmes en 1868 sur le sort de Jo, Meg, Beth et Amy, les héroïnes de « Little women ». Et sans doute avez-vous, comme elles, séché quelque peu ces larmes, en lisant « Le docteur March marie ses filles » que leur mère de plume, Louisa May Alcott, avait publié promptement l’année suivante. Continuer la lecture

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Vaste appel d’air architectural à l’Ouest de Paris

parc des expositions versailles. Photo: PHB/LSDPSelon une vision exprimée de Serge Trigano, les petites villes concentrent l’énergie en leur centre tandis que l’inverse se produit en périphérie pour les grandes villes. Son précepte se vérifie actuellement dans les grandes largeurs, entre Paris, Porte de Versailles et Porte de la Plaine. Nous sommes aux frontières Sud Ouest de la ville, entre le 15ème arrondissement, Vanves et Issy les Moulineaux. Là se trouve le Parc des Expositions : 7 pavillons soit 216 000 m2 de halls qui accueillent la Foire de Paris et toutes sortes de salons et de foires, un genre d’exposition universelle permanente. Avant, le Parc, c’était la zone, le règne du béton, un espace urbain délaissé, une sorte de friche urbaine qui végétait entre les salons. Continuer la lecture

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Le glamour en négatif de Diao Yinan

Au tout début du film nous assistons à une réunion d’une bande de voleurs de motos, qui se répartissent les quartiers à opérer, clan par clan. Cela se passe dans le sous-sol d’un hôtel miteux. Une simple ampoule éclaire le lieu. Un genre de speaker explique aux participants comment chaparder un deux-roues sans se faire prendre. Parmi eux il y a Zhou Zenong (Hu Ge) qui vient lui aussi prendre sa part de gâteau. Sauf que le séminaire commercial va mal tourner et qu’il va devoir prendre la fuite parce qu’il a, sans le vouloir, tué un policier. Plus tard, le réalisateur a visiblement cherché à produire un effet de similitude, puisqu’il nous emmène dans un meeting policier où chaque policier se voit attribuer un secteur dans lequel Zhou Zenong se cache peut-être. Là aussi les murs vont du gris au verdâtre, selon leur proximité avec un éclairage blafard à souhait. La couleur de l’affiche est singulièrement trompeuse. Continuer la lecture

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Dernières nouvelles d’Albert de Kostrowitzky

acte de deces de albert apollinaire source genea netL’information justifiait de briser la trêve de Noël car on a retrouvé le certificat de décès de Alberto Eugenio Giovanni de Kostrowitzky, le demi-frère de Guillaume Apollinaire. On savait très peu de choses sur sa disparition en 1919 au Mexique. Il appert du certificat (ci-contre) daté du 5 juin 1919, qu’il a expiré la veille à 36 ans (à 14h45) d’une septicémie-phlébite-typhus dans un hôpital français au numéro 150 de la rue de l’hôpital. Le certificat dit aussi qu’il est agent de négoce. Selon nos recherches, il a été enterré au « Panteon Frances de la Piedad, Mexico, Mexique ». Toutes sortes d’informations que sauf erreur, les biographes d’Apollinaire ne connaissaient pas avec certitude. Récit d’une découverte avec l’aimable complicité de Gérard Goutierre pour la traduction. Continuer la lecture

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Le petit livre jaune

Moins qu’un livre d’ailleurs, devrait-on dire un fascicule. L’auteur en est Henri de Lescoët. Un homme qui se rappelle à notre bon souvenir chaque automne depuis 1941, lors de la remise du prix Apollinaire (1). Il publie ce très mince ouvrage jaune pâle en 1989 depuis Nice où il réside. À 89 ans cette année-là, il a tenu à rédiger quelques pages à l’adresse d’Apollinaire. On y apprend qu’il a vécu un an rue de Palermo chez ses beaux-parents dans l’immeuble même où Apollinaire s’engagea pour la durée de la guerre. Henri de Lescoët y évoque aussi l’enfance niçoise d’Apollinaire ainsi que le « très attentif ami » René Dalize qui avait dénommé son copain de classe, « le roi de la blague bien fraîche ». S’y ajoutent également quelques illustrations de l’auteur ainsi que son propre portrait exécuté par Cocteau. Continuer la lecture

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