Viens chez moi, je fais une soirée diapos

Quand j’ai annoncé la nouvelle à mon ami, il n’en revenait pas. Il n’est pourtant pas du genre à s’en laisser conter (pensez donc : il est Parisien). Mais là je l’ai senti étonné, presque admiratif. D’ailleurs il n’a pas hésité et m’a répondu tout de go «Alors là, je viens». Je venais de lui apprendre que j’organisais chez moi une « soirée diapos ». Oui une vraie soirée privée où je projetterai des diapositives, à l’ancienne, en vrai et en direct, bref en live, avec un projecteur et un écran sur pied. Une soirée comme celles auxquelles vous avez forcément assisté un jour ou l’autre, à condition que vous soyez de la génération de ceux qu’on appelle aujourd’hui les boomers. Continuer la lecture

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Un bruit a couru…

… qu’un magasin de parfumerie allait bientôt remplacer la librairie Gibert, place Saint-Michel à Paris, suscitant un début de relatif affolement. C’était un faux bruit. En fait, il devrait bien y avoir début décembre une substitution sur cette place où l’on mange de moins en moins et de moins en moins bien, mais justement, sur le site d’un lieu de restauration, une brasserie, pas une librairie. Cela fait peine. Les fragrances, fussent-elles sublimes ne nourrissent pas son homme. Mais, si on creuse un peu dans l’histoire de ce large espace dû depuis 1855 à Haussmann, on apprend qu’au numéro deux, là où se trouve la librairie Gibert Jeune (1), il y avait un restaurant, « La rôtisserie périgourdine ». Ce « temple des gourmets » ainsi qu’il s’intitulait sur une carte postale de haute époque, proposait notamment de la truffe sous la cendre et on se demande un peu où pareil plat pourrait se déguster aujourd’hui dans Paris. Continuer la lecture

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Gare au greenwashing de la Tour Montparnasse

Que faire de la tour Montparnasse se dressant telle une hérésie architecturale dans le ciel parisien depuis 1973 du haut de ses 210 mètres, défigurant à elle seule tant de belles perspectives haussmanniennes depuis le Champs de Mars, le jardin du Luxembourg ou la rue de Rennes ?
La municipalité parisienne s’est penchée sur son devenir, d’autant plus que les alentours sont un désastre urbain. Elle aurait pu opter pour la démolition, comme on le fait ailleurs dans la couronne parisienne pour certaines aberrations des années 1970.
La tour n’aurait manqué à personne, et le geste aurait été radical, exemplaire et libérateur. Continuer la lecture

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Ainsi était SIC

Invitée récemment au Musée des Beaux-Arts de Tourcoing (exposition sur Picasso illustrateur, jusqu’au 13 janvier), Patricia Sustrac, présidente de l’association des Amis de Max Jacob, glissait dans sa conférence, sans doute à l’attention d’étudiants ou d’universitaires, que le numéro spécial Apollinaire de la revue d’avant- garde SIC (janvier-février 1919) constituerait un excellent sujet de thèse.
La rédaction d’une thèse n’est pas véritablement dans les objectifs des Soirées de Paris. Mais en attendant qu’un chercheur publie le résultat de ses investigations, ce qui lui prendra plusieurs années, nous pouvons au moins évoquer cet extraordinaire numéro, ayant eu la chance de le dénicher dans une salle de ventes de Bruxelles. Il est vrai qu’on peut le consulter également sur le site Gallica et que l’intégralité de la revue est parue en fac similé chez J.-M. Place. Continuer la lecture

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Le Louvre en compagnie de Jean-Michel Othoniel

En ce mercredi de novembre 2019, une petite dizaine de personnes eurent l’immense privilège de visiter le Louvre en compagnie d’un guide pour le moins exceptionnel, l’artiste plasticien Jean-Michel Othoniel. Alors que ses peintures de roses reposent désormais pour l’éternité au sein des niches de la Cour Puget, l’artiste nous conviait à une visite du musée à travers la symbolique des fleurs. S’il est essentiellement connu pour ses installations et sculptures en perles de verre colorées, Othoniel excelle également dans la création d’herbiers artistiques, tel son nouvel “Herbier merveilleux”, les plantes n’ayant apparemment aucun secret pour lui. Botaniste à ses heures donc, doté d’une âme de conteur, l’artiste a le don de faire partager sa passion et d’éclairer le regard de son auditoire. Après une telle visite et avec un tel ouvrage, débusquer la petite fleur dans un tableau devient un véritable jeu. Continuer la lecture

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La grande bouffe bio

Par « grande », il faut entendre « haut niveau gustatif », encore que le titre de cette chronique pourrait laisser supposer une allusion à la fameuse orgie culinaire du film de Marco Ferreri sorti en 1973. Mais, on s’en doute, c’est fait exprès. En mode bio, Marco Ferreri aurait probablement dû se contenter d’un court métrage afin de signifier combien il est important de préserver la ressource et le climat. Si un réalisateur se piquait de faire un remake, il pourrait au moins extirper de ce livre qui vient de sortir, « La cuisine d’un monde qui change », de savoureuses recettes caractérisées par une empreinte carbone faible, préoccupation toute nouvelle dans la mesure où nous sommes désormais plus de sept milliards à puiser dans les stocks terrestres. « Ces pages, indique son auteur Géraldine Meignan, visent à changer le cours tranquille de nos habitudes culinaires » sans que cela ne soit pris pour une punition. Continuer la lecture

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L’héritage sensible de Peter Hujar

Au train où vont les choses paraît-il, la vraie photo devrait peu à peu laisser sa place dans les musées pour la composition abstraite, l’assemblage créatif, la construction inspirée. Raison de plus pour aller faire connaissance au Musée du Jeu de Paume avec Peter Hujar, né dans le New Jersey en 1934 et fauché précocement, en 1987, par une de ces maladies opportunistes que favorisait  le SIDA. Pose, cadrage, réglages des contrastes et de la lumière, on ne faisait à cette époque pas davantage avant de décider un tirage sur papier. Hormis quelques vues urbaines, Peter Jujar privilégiait l’humain, en puisant notamment dans le milieu qu’il fréquentait, comme des artistes ou des travestis. On ne manquera pas cependant d’être frappé avec quel talent, quelle acuité il capturait aussi des animaux, en particulier des chiens ainsi qu’une oie saisissante de vie. Continuer la lecture

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À Lille, tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les artistes

Le catalogue reproduit en couverture un autoportrait de Frida Kahlo. Mais ça aurait pu tout aussi bien être « La Joconde » de Leonardo, « La Jeune Fille à la perle » de Vermeer ou « L’Olympia » de Manet. Parce que le thème de l’exposition présenté par le palais des Beaux Arts de Lille, en collaboration avec la Réunion des Musées nationaux , « Le rêve d’être artiste » est le plus vaste et le plus vague qui soit, le plus déroutant et le plus passionnant aussi. Parler de la condition de l’artiste dans un musée est une périlleuse mise en abyme. La question est moins celle du choix que celle du trop plein, d’autant que le musée nordiste, contrairement au Louvre qui propose une exposition sur le même thème («Figure d’artiste» dans la Petite Galerie, jusqu’en juin 2020) ne se limite pas dans la temps. Ici l’exposition va du Moyen Âge jusqu’à nos jours, avec 120 œuvres, et la plus grande diversité d’expressions, de sujets et de techniques. Continuer la lecture

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Jonas et Benjamin donnent de la voix

Que faire quand on est le plus grand, le plus intelligent et le plus beau des ténors incarnés dans un seul homme, et qu’à l’aube de la cinquantaine, on a pratiquement déjà tout enregistré, de Verdi à Wagner, sans oublier « Parla piu piano » de Nino Rota ? Jonas Kaufmann a trouvé la solution, en nous emportant sur les ailes de la valse viennoise.
Mais attention, ce n’est pas un pis-aller : ce Munichois professe un véritable amour pour l’opérette viennoise, et nous a déjà entraîné, il y a cinq ans, à Berlin, où régnait Franz Lehár dans les années 20 et 30. Et pour se conformer à la tradition, il entonnait « Je t’ai donné mon cœur » face à un micro, le péché suprême pour un ténor !
Je me souviens qu’il s’en excusait au début de son récital au Théâtre des Champs-Élysées en 2015. Mais vers la fin, agenouillé face à la salle en délire, il mettait le micro de côté, et nous régalait de quelques airs d’opéra à pleine voix. Continuer la lecture

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Le gentleman polymathe

Sa fille Barbara évoque à propos de son père une « obsession graphomane » et, honnêtement, elle n’a pas tout à fait tort. Mais le cas de Bernard Dupuis est bien plus compliqué (et bien plus riche) qu’une simple manie. Les textes qu’il transpose sur des galets, des os, des mâchoires, des pavés, des lattes de bois, des coquillages et même sur papier, sont tirés de la poésie de Cendrars (ci-contre), Queneau ou encore Apollinaire. L’on est quand même un peu médusé par la capacité de cet artiste à saturer la surface d’un galet à la plume, qui plus est d’une écriture lisible jusqu’au bout, à condition bien sûr de faire pivoter le caillou. Le dernier support sur lequel ce médecin-pharmacologue de 82 ans a jeté son dévolu est le bambou, soigneusement lissé pour y accueillir des textes choisis. Il expose en ce moment-même chez Méert, cette vieille maison lilloise ayant gâté des générations de gourmets avec ses gaufres fondantes à la vanille de Madagascar. Continuer la lecture

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