L’expo-canon

Ce poignard sûrement bien pratique pour dissuader les fâcheux, a été offert en 2007 par Mouammar Kadhafi chef de l’État libyen, à Nicolas Sarkozy  chef de l’État français. En retour on s’en souvient sans doute, le second a manifesté toute sa gratitude au premier avec un largage de bombes à domicile qui devait se terminer en lynchage fatal. Ce n’est pas ici, l’une des moindres surprises de l’exposition « Les canons de l’élégance », qui vient de débuter au musée de l’Armée. L’idée générale est de montrer que dans toute bataille, le style n’est pas qu’un accessoire, qu’il s’agisse du vêtement ou de l’arme que l’on porte à sa ceinture. « Plus on se croit beau, mieux on se bat », disait le général François du Barail (1820-1902), ce qui signifie qu’il vaut mieux éviter le vieux jogging orange à bandes blanches latérales avant de monter à l’assaut. Quitte à faire la guerre en effet, mieux vaut un bel uniforme et tant pis si cela fait une bien meilleure cible face aux snipers du camp adverse. Continuer la lecture

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Retrouvailles

Non loin du Mouffetard, ce théâtre des arts de la marionnette désormais bien connu des lectrices et lecteurs des Soirées de Paris, se trouve un autre petit théâtre, tout aussi charmant, à la programmation on ne peut plus dense et manifestement de qualité (1) : le Théâtre de la Contrescarpe. Situé à deux pas de la place du même nom, plus précisément rue Blainville, faisant face à un succulent restaurant coréen (2), il présente actuellement “Fausse note” de Didier Caron, un des grands succès de l’année 2017, dans une mise en scène et une distribution cette fois-ci tout autres, Pierre Deny et Pierre Azéma interprétant avec talent les rôles créés à l’origine par Christophe Malavoy et Tom Novembre. Continuer la lecture

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Carré de jeunesse

Entre autres remèdes pour tromper l’angoisse, en attendant de savoir lundi qui aura le Goncourt, on peut toujours faire un saut en haut de la rue Ménilmontant, là où Jules et Edmond Goncourt passèrent une partie de leur jeunesse. Il reste un bout de l’édifice originel, de ce Pavillon Carré de Baudouin comme on l’appelle maintenant, avec ses colonnes ioniques ouvrant sur un petit jardin. Le lieu est devenu un espace d’expérimentation culturelle où l’on vit il y a peu une assez exceptionnelle exposition relative au photographe Willy Ronis. Et c’est donc là que jouèrent un temps les deux frères Goncourt, privés de leurs deux sœurs disparues prématurément. André Billy (décidément) avait écrit une biographie pondérale des deux garçons. Lui-même était membre de l’académie Goncourt. Continuer la lecture

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Amandine dans les brumes

Il a suffi qu’un livre lassé de son équilibre précaire, tombe un jour de l’armoire, pour faire éclore un souvenir également tapi sous des dizaines d’autres. Il s’agissait d’une biographie de l’écrivain et poète Blaise Cendrars, rédigée par son ami belge Albert T’Serstevens. L’apparition accidentelle de cet ouvrage publié en 1972 chez Denoël avait donc réveillé une anecdote. Y figurait incidemment la dernière lettre expédiée par Cendrars à l’auteur en mars 1958. À vrai dire il s’agissait davantage d’un petit mot à l’écriture malhabile et qui se terminait par ce minuscule post-scriptum: « Bonnes amitiés à Amandine ». C’est le point de départ de l’anecdote de ce jour. Continuer la lecture

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On dirait un serpent qui danse

les fleurs du mal préfacées par Apollinaire Photo: PHB/LSDPDans son introduction au recueil « Les fleurs du mal », Guillaume Apollinaire commet un intéressant parallèle avec Laclos, qui publia les « Liaisons dangereuses » alors qu’il était encore officier d’artillerie. Apollinaire qui fut également artilleur estime en effet que Laclos a tenté d’appliquer aux mœurs les lois de la triangulation propres au tir. Et que c’est à partir des « mesures angulaires calculées par Laclos » que « naquit l’esprit littéraire moderne »  dont se serait inspiré Baudelaire. Continuer la lecture

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Livraisons au chrono

Quand le chic actionnaire d’une société de livraison à domicile se voit livrer son repas du soir ou un colis quelconque par un cycliste hors d’haleine, il peut se satisfaire tout d’abord de la très rare vision d’un retour complet sur investissement. La Bourse le rémunère par le haut tandis que le coursier le conforte par le bas, dans l’idée que la société Internet, bouclant la boucle, atteint la perfection. Cependant qu’à travers « Sorry we missed you », Ken Loach ne s’est intéressé, lui, qu’à l’existence de ces milliers d’anonymes qui parcourent les rues en tous sens. Son jeune héros Ricky a même embarqué dans sa camionnette une bouteille de plastique afin de s’y soulager sans que cela ne pénalise le minutage drastique de la livraison. Continuer la lecture

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Félix Fénéon, un esprit d’un temps nouveau

“Critique d’art, collectionneur, anarchiste” (1), mais aussi rédacteur, éditeur, directeur de galerie… la liste semble ne plus vouloir s’arrêter. Personnage à l’énergie débordante, aux activités multiples où l’art et la littérature se rejoignaient sans cesse, Félix Fénéon fut indéniablement une figure majeure du monde artistique de la fin du XIXème-début du XXème siècle.  “Félix Fénéon (1861-1944). Les temps nouveaux, de Seurat à Matisse”, l’exposition qui lui est actuellement consacrée au Musée de l’Orangerie, est le pendant de celle qui s’est tenue il y a peu de temps encore au Musée du Quai Branly-Jacques Chirac (2). Alors que cette dernière se focalisait essentiellement sur les pièces d’art africain de cet étonnant collectionneur, celle de l’Orangerie, à travers de nombreuses œuvres des artistes qu’il aimait à collectionner et divers documents d’époque, revient sur sa singulière personnalité. Félix Fénéon, un esprit d’un temps nouveau. Continuer la lecture

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Premier convoi, premier tome

Afin de mieux raconter l’histoire du premier convoi de Parisiens partis coloniser l’Algérie en 1848, Michèle Perret a créé une famille de personnages. Des femmes, des hommes et quelques enfants, tous pauvres, pour lesquels l’État français avait trouvé un bon moyen de les éloigner. La France comptait alors 40% de chômeurs et certains, gilets jaunes avant l’heure, avaient dressé des barricades. Les émeutes avaient été durement réprimées. Des prospectus vantant un pays de cocagne avaient été distribués. Ils promettaient aux volontaires « une petite maison et des terres à cultiver dans un pays de lacs et de rivières où poussent les bananiers, les orangers et le blé à foison ». Ce qui était faux. Continuer la lecture

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La gastronomie envolée d’Edouard Nignon

Cette recette-là n’était pas bien compliquée. Il s’agissait d’un hors-d’œuvre froid intitulé « Les huîtres de Marennes aux tartines de gruyère ». Il fallait parer un pain bis à huîtres, en enlever la croûte et le tailler en petites tranches très minces, étalées de beurre frais. Ensuite il convenait de déposer sur chaque tranche une lamelle de gruyère, couvrir l’édicule d’une nouvelle tartine, d’accompagner le tout d’huîtres très fraîches servies sur de la glace pilée reposant sur une serviette. Encore ne s’agissait-il pas ici d’une recette mais d’une « formule », mot exclusivement utilisé par le chef Édouard Nignon (1865-1934).
Il se trouve qu’un exemplaire original écrit par lui est livré à la dispersion aujourd’hui-même chez Drouot. « L’Heptaméron des Gourmets ou les délices de la cuisine française » est estimé entre trois et cinq mille euros. Il comportait outre la prose de l’auteur, des interventions d’écrivains (dont Guillaume Apollinaire) relatant un banquet intemporel autant que mirifique ou des esclaves demi-nus prêtaient leur chevelure aux convives afin qu’ils s’y essuyassent les doigts. Heureusement qu’à ce prix, cet ouvrage, paru en 1919, est aussi en consultation libre sur Gallica. Continuer la lecture

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Hal Hartley, le retour

Bonne nouvelle, l’ami Hartley est de retour après une très longue absence. Le cinéaste américain retrouve les salles françaises depuis le 25 septembre avec la version restaurée de ses trois premiers films, réunis sous le titre « La trilogie de Long Island » mais hélas pas avec un nouvel opus. Alors, pour celles et ceux qui n’ont pas vu ses films dans les années 90, qui est donc Hal Hartley ? Chouchou des critiques et d’un public tombé sous le charme irrésistible de son univers, qu’un mot résume à lui seul, décalé, Hal Hartley a porté haut et fort les couleurs du cinéma indépendant américain avant de tomber dans un oubli assez inexplicable au siècle suivant. Continuer la lecture

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