L’histoire découpée de la famille Van Campen

C’est l’histoire d’un portrait de famille, celui de la famille Van Campen. C’est aussi l’histoire d’une extraordinaire enquête scientifique qui est à l’origine de l’exposition de la Fondation Custodia. Nous sommes aux Pays Bas à l’époque de Frans Hals (1582-83/ 1666), un des plus grands portraitistes du siècle d’or hollandais qui, avec Rembrandt, a révolutionné le genre. Gijsbert Claesz Van Campen (1585-1645) est un prospère marchand de draps de Harlem, riche également par son importante progéniture. Celui ci avait commandé un portrait de sa famille à une époque où les portraitistes étaient encore considérés comme des artisans, payés à la figure. La famille était nombreuse, Van Campen avait les moyens. Continuer la lecture

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Les tribulations de Chateaubriand à la loupe

La journée d’étude que la Société Chateaubriand organisait le 15 juin dernier à l’École Normale Supérieure était consacrée au rayonnement international de Chateaubriand. Elle faisait suite à un premier exposé sur Chateaubriand en Espagne de Tomas Gonzalo Santos, professeur à l’Université de Salamanque (colloque du 11 juin 2016) et aux communications de Stefano De Luca, Pierino Gallo, Marina Vazaca et Galina Ovtchinikova lors du colloque de Rome de la Société (Université LUMSA, 6 octobre 2018). Sa conception avait été confiée à Fabienne Bercegol, professeur à l’Université Toulouse Jean Jaurès, et reposait sur l’idée d’une sorte de grand voyage à l’envers. Nous avons ainsi cheminé de l’Asie vers l’Europe, en transitant par l’Amérique. Continuer la lecture

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Amiens entre « aires » et « rieux »

Notre petite embarcation glisse sur l’eau du canal. Le moteur électrique est complètement silencieux et le pépiement des oiseaux prend tout l’espace sonore. Nous avons embarqué à « Port à Fumier » à proximité immédiate d’Amiens -ça ne s’invente pas- et tout de suite, nous voilà en immersion au cœur des hortillonnages.
Les hortillonnages d’Amiens sont un lieu unique en France qui s’étend sur 300 hectares d’anciens marais desservis par 65 km de canaux dont l’origine remonte au Moyen Age (XII ème siècle). Ils sont constitués d’une multitude d’îles alluvionnaires très fertiles, les «aires» accessibles uniquement en barques grâce à un réseau de petits canaux appelés les « rieux », nom picard des hortillonnages. Continuer la lecture

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Un parasite palmé

Je n’avais pas vu les précédents films du cinéaste sud-coréen Bong Joon-ho, mais je savais qu’il avait remporté la palme d’or à Cannes avec « Parasite », que les critiques françaises étaient excellentes, et j’en connaissais le thème : une famille pauvre s’insinue par le mensonge dans les faveurs d’une famille riche. J’avais cru comprendre qu’il y avait là un thème de comédie sociale plutôt réjouissant méritant donc la palme. Je pensais même à l’un de mes films américains préférés, « My man Godfrey », signé Gregory La Cava, où l’exquise Carole Lombard « adopte » en 1936 un SDF découvert dans un terrain vague et le promène comme un trophée parmi la riche société newyorkaise. Continuer la lecture

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L’autre vie de Dora Maar

Sur la fin de sa vie, Dora Maar avait choisi la réclusion. Elle accomplissait toujours son œuvre d’artiste mais dans une discrétion totale. Dans les années quatre-vingt elle avait notamment conçu des négatifs abstraits dont l’on voit ci-contre un détail. Après son décès en 1997, son travail a été dispersé, braquant dans le même temps un projecteur sur cette personnalité oubliée. Née en 1907, elle avait été durant près de dix ans, la compagne créatrice de Pablo Picasso. L’idée de la très vaste rétrospective organisée par le Centre Pompidou est de démontrer qu’au-delà de la séquence intense qu’elle avait partagée avec Picasso, il y avait eu un avant et un après. Continuer la lecture

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Une matinée chez Boris Vian Cité Véron

Alors que le 23 juin 2019 marquera les soixante ans de la disparition de Boris Vian (1920-1959) et que les hommages ne manquent déjà pas de se succéder, force est de constater que l’écrivain connaît de nos jours une renommée et une reconnaissance littéraire qui lui manquèrent de son vivant. “L’Écume des jours”, “L’Automne à Pékin”, “L’Herbe rouge”, “L’Arrache-cœur”… sont devenus aujourd’hui des classiques que les jeunes générations prennent toujours plaisir à découvrir, tout comme ses innombrables chansons, elles aussi indémodables. Écrivain, poète, parolier, chanteur, trompettiste de jazz, critique musical, scénariste, traducteur, acteur, peintre… plus d’un demi-siècle après sa mort, l’artiste protéiforme semble faire plus que jamais partie du paysage culturel. Une visite de l’appartement qu’il occupa Cité Véron les six dernières années de sa vie avec sa seconde épouse Ursula pourrait même nous faire croire à son éternelle présence… Continuer la lecture

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Terre des hommes

carte du burkina faso photo: PHB/LSDPLe fourgon avale la piste, une ligne droite ocre et  poussiéreuse, paysage de brousse avec de loin en loin de hauts arbres solitaires. La piste devient route, la circulation s’intensifie, nous traversons Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso. Ici cyclomoteur est roi, il surfe au milieu des voitures. À l’arrière du fourgon, un enfant, trois ans peut-être, somnole la tête sur la poitrine de sa mère. Le chauffeur et son passager parlent peu. Au Burkina Faso, la langue officielle est le français ; il existe en outre une soixantaine de langues nationales. Cela dit français ou pas, il n’est pas facile de suivre une conversation! Après 200 kilomètres d’une seule traite, le fourgon s’arrête devant les bâtiments simples et élégants de l’aéroport de Ouagadougou. Continuer la lecture

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Fly me to the moon

Soit l’histoire d’un adulte blanchi sous le harnais et qui s’arrête devant une librairie parisienne. Sa curiosité est piquée par la couverture d’un livre bien mis en évidence dans la vitrine. La couverture montre un engin spatial tout jaune. On voit une passerelle par laquelle grimpent des enfants en tenue de cosmonautes. Le livre s’intitule « Classe de lune ». Son auteur est un américain, un certain John Hare. Il n’y pas de texte, que des images et pourtant, l’histoire nous transporte au propre comme au figuré. Continuer la lecture

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La légende contrastée d’une invisible

L’étrange destin de Vivian Maier a été beaucoup raconté lorsque, de façon posthume et très savamment médiatisée, les milliers de photos qu’elle avait prises sont devenues une « Œuvre ». Une gloire tardive éclatante pour consacrer une vie obscure. Fallait-il en faire un livre et si oui, dans quel registre ?
Gaëlle Josse a choisi une certaine ambiguïté. En tête de livre, figure – en anglais, on se demande bien pourquoi – la mention classique « ceci est une fiction… , toute ressemblance avec des personnages ayant existé serait une pure coïncidence… ». Et, en fin de livre, l’auteur remercie toutes les sources qui lui ont permis de retracer les étapes d’un parcours de vie, celui de Vivian Maier après avoir avoué s’être refusée à toute biographie romancée. On imagine une prudence d’avocat. On regrette cette posture d’un choix mal assumé. Continuer la lecture

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Le Paris romantique de Daphné en escarpins

Que veux tu faire aujourd’hui ? me demanda Daphné.
Le soleil dardait sur nous ses premiers rayons, après plusieurs jours d’un temps maussade qui avait engourdi les corps et les esprits. La terrasse où nous étions installés était comble. Les garçons de café se croisaient et s’entrecroisaient, plateau rempli de boissons fraiches à la main, comme sur une scène de théâtre. Un peu sur notre droite, un petit chien blanc aux yeux coquins aboyait pour ne pas se faire oublier de ses maîtres, qui dégustaient sans faire attention à lui leur repas dominical.
Nous pourrions aller voir l’exposition « Paris romantique », répondis-je, alors qu’en face de nous, juste de l’autre côté de la rue, commençait un concert de jazz improvisé.
Si tu veux, répondit Daphné d’un air rêveur.
Cela n’a pas l’air de t’enthousiasmer, lui dis-je.
Le son du piano se faisait subitement plus fort, au point de couvrir presque complètement celui de nos voix. Continuer la lecture

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