Un été si dérisoire

Il disait de sa fille qu’elle était de la « même espèce » que lui, parfaitement « inapte à l’effort » et seulement guidée par l’esprit de jouissance. Pas étonnant que cette version en bande dessinée de « Bonjour tristesse » a été préfacée par Frédéric Beigbeder auteur polyvalent à qui l’on prête le goût du futile et une vision indulgente de la débauche.  Joliment écrit, dessiné et coloré, la déclinaison de Frédéric Rébéna nous invite en plein hiver à des vacances sur la Côte avec une élégante villa pour cadre et des protagonistes très légèrement habillés. Continuer la lecture

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Dominique Bona refait le match

Lorsqu’un auteur rédige une biographie  il y met toujours un peu de lui-même, rien que par le style, l’approche, les choix, les angles, les préférences de narration. S’il rédige de façon dont il a écrit une ou plusieurs biographies, la proportion de part intérieure s’accroît nettement. Vient un jour le temps de l’autobiographie délibérée où les êtres comme les objets ne sont plus que les ingrédients d’un récit personnel. Avec « Mes vies secrètes » qu’elle vient de publier chez Gallimard, Dominique Bona n’en est qu’à la seconde étape. L’académicienne y dévoile le cheminement qui l’a conduite à dresser le portrait de Stefan Zweig, Gala, Clara Malraux ou encore les sœurs Heredia. De fait ses « vies secrètes » sont un peu ses secrets de cuisine. Continuer la lecture

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La petite musique de Marguerite Duras

“Savannah Bay”. Le titre nous évoque aussitôt la mer, mais aussi l’image de ce couple d’immenses comédiennes qui furent les créatrices de cette pièce de théâtre mise en scène par l’auteur elle-même, Marguerite Duras (1914-1996), au Théâtre du Rond-Point en 1983 : Madeleine Renaud, alors âgée de quatre-vingt-trois ans, et Bulle Ogier. Un grand moment de théâtre entré dans la légende. La pièce, dès le départ, avait d’ailleurs été écrite pour l’inoubliable interprète de “Oh les beaux jours”, les deux personnages étant mentionnés, dans le texte original, comme “Madeleine” et “Jeune femme”. D’autres merveilleuses actrices, par la suite, jouèrent le rôle de la vieille dame : Gisèle Casadesus, Catherine Samie ou encore Emmanuelle Riva, pour n’en citer que quelques-unes. Aujourd’hui, c’est Michèle Simonnet, tout aussi talentueuse que les précédentes, qui reprend le flambeau sur la petite scène du Théâtre Rouge du Lucernaire, dans une mise en scène de Christophe Thiry. Continuer la lecture

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L’aventure est au coin de la bibliothèque…

Explorer, décrire, imaginer. C’est ce que propose l’exposition Récits du Monde conçue par le philosophe Gilles A. Tiberghien, à qui l’IMEC (Institut Mémoires de l’Édition Contemporaine) a offert une carte blanche.
Sis à l’Abbaye d’Ardenne, aux portes de Caen, l’IMEC est un lieu inspiré et inspirant. Fondée au XIIe siècle, cette abbaye revient de loin car il n’en restait plus grand-chose depuis la bataille de Caen du 7 juin 1944. Après une grande campagne de restauration, ce centre unique en France inauguré en 2004 est dédié à la valorisation de l’écrit, de l’édition et de la création par l’organisation d’expositions, de colloques, de rencontres littéraires, de conférences et autres activités destinées à tous les amoureux de la vie intellectuelle française contemporaine, l’autre volet de ses missions étant la conservation des archives de la collection de l’IMEC. Continuer la lecture

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Murakami a encore frappé

N’étant généralement pas attirée par la littérature dite populaire à grand tirage, j’avais vaguement connaissance du nom de Murakami, lié à l’archi best seller « 1Q84 » publié en 2009-1010, inspiré du fameux « 1984 » d’Orwell. Et voilà que je tombai sur un article du « Monde des Livres » daté du 19 octobre dernier intitulé « Murakami, une touche de génie », signé Florence Bouchy, saluant les deux tomes de son dernier opus « Le Meurtre du Commandeur ».
J’étais ébranlée. Se pouvait-il qu’un écrivain ayant vendu quatre millions d’exemplaires de « 1Q84 » et un million et demi du « Meurtre du Commandeur » en deux mois au Japon soit en même temps un grand écrivain ? Continuer la lecture

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Gaston Picard, « délicat amant des bonnes lettres »

Avec un patronyme aussi banal que celui d’un personnage de Simenon et une œuvre littéraire qui ne connut qu’un succès d’estime, Gaston Picard n’a sans doute pas bénéficié de la reconnaissance d’un large public. Ce personnage sympathique est pourtant l’un de ceux qui ont le plus contribué à animer la vie littéraire française dans la première moitié du XXe siècle.
Né et mort à Paris (1892-1962), cet infatigable chroniqueur collabora à un grand nombre de revues littéraires, ces petite revues souvent éphémères qui pullulaient en France avant 1940. Lui-même en dirigea deux, en 1911 et 1912 : « L’Heure qui sonne » et « L’Œil de veau ». Cette dernière, sous-titrée « Revue encyclopédique à l’usage des gens d’esprit », était co-dirigée par le jeune compositeur Roland Manuel, et comptait parmi ses collaborateurs un certain Erik Satie. Continuer la lecture

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Rousses exclusivement

Il aimait tellement les rousses que c’était devenu sa signature, un signe de reconnaissance. La première rousse de Jean-Jacques Henner apparaît en 1872 à travers une toile intitulée « Idylle ». Pour cette inclination il changeait au besoin la couleur des cheveux de ses modèles. Et il avait même décidé que le Christ avait une chevelure rousse profitant à ce propos d’une absence d’indication historique. Le musée national Jean-Jacques Henner (1829-1905) fait de cette couleur particulière le thème de sa nouvelle exposition qui vient de débuter et qui s’achèvera le 20 mai. La scénographie mélange des œuvres de la collection permanente de cet établissement situé avenue de Villiers avec des réalisations d’autres auteurs. Continuer la lecture

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L’annuaire fleuri de Monaco

Jean-Baptiste Pastorini avait une âme de poète. Dans l’annuaire de Monaco qu’il s’était procuré en 1889, il avait inscrit son nom et inséré (peut-être son épouse) quatre fleurs afin qu’elles y séchassent. Deux graminées ont trop pâli. Il faudrait un botaniste pour les identifier. Et puis (selon toute apparence) deux coquelicots cueillis au printemps de la même année, ou l’été précédent qui sait. Toujours est-il que cela fera 130 ans le 31 janvier que cet annuaire a été imprimé. La date est mentionnée plusieurs fois au long des pages. Cela faisait deux ans que la principauté venait de subir un tremblement de terre. Et c’est à cette époque également que Guillaume Apollinaire a vécu une partie de son enfance avec son frère et sa mère. D’où l’intérêt de cette relique repérée sur Ebay. Continuer la lecture

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Ehpad connection

Passé un certain âge nous ne sommes plus suspects. C’est l’une des démonstrations du film d’Eastwood avec Eastwood, « The mule ». Et, franchi le cap des 90 ans (89 exactement pour l’ex-inspecteur Harry, né en 1930) il n’y pas de raison de cesser de faire des choses en général et de raconter des histoires au cinéma en particulier.
Earl Stone, principal personnage du film, accepte un jour de faire le chauffeur à un moment de la vie où l’on n’est plus qu’une donnée statistique. Ce qu’il ne sait pas, au moins au début, c’est qu’il transporte de la drogue. « La mule » est le récit d’une histoire réelle où chacun y trouve son compte. Continuer la lecture

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La singulière signature de Vivian Maier

Sur plus de cent mille clichés potentiels, ce qui nous est donné à voir peut sembler un peu chiche. Il faut dire que les œuvres en couleur de Vivian Maier présentées par la galerie Les Douches dans le dixième arrondissement n’occupent que deux pièces de taille moyenne. Or il faudrait un (grand) musée pour faire tenir une rétrospective complète. L’échantillon ainsi resserré donne néanmoins une bonne mesure de cette photographe apparue par surprise en 2007 à la faveur d’un hasard de vente à l’encan. En effet, c’est d’abord l’histoire d’un jeune américain de 25 ans qui cherchait des illustrations sur un quartier de Chicago. John Maloof acquiert un jour aux enchères un carton de mystérieux négatifs. Se rendant compte progressivement et après consultations de la valeur de son trésor, il se débrouillera par la suite afin d’acquérir la quasi-totalité d’une artiste jusqu’alors inconnue. Continuer la lecture

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