Ceija Stojka : peindre l’inconcevable

Comment raconter l’indicible, comment représenter l’horreur dans ses formes les plus inhumaines ? Ces questions, Ceija Stojka (1933-2013) y a répondu sur le tard, quarante ans après avoir survécu à trois camps de concentration nazis où elle a été successivement déportée entre 10 et 12 ans, pour le seul crime d’être Rom. Auschwitz-Birkenau, Ravensbrück, Bergen-Belsen, drôles d’endroits pour grandir, acquérir des valeurs d’humanité et se forger une image du monde. La petite Ceija, en est sortie vivante avec sa mère, a retrouvé une partie de sa famille (90% des Roms et Sintis autrichiens ont été exterminés), et a repris une vie « normale ». Continuer la lecture

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Il y a mon cœur qui bat pour toi…

Marie Dubois, Annie Playden, Marie Laurencin, Louise de Coligny-Châtillon, dite Lou, Madeleine Pagès, Jacqueline Kolb… Guillaume Apollinaire (1880-1918), le poète à la vie si tragiquement courte fut un grand amoureux romantique, fougueux et passionné. Les nombreux poèmes et lettres que lui inspirèrent ses amours font indéniablement partie aujourd’hui encore des plus belles pages de la littérature française. Marie bien évidemment, immortalisée dans “Alcools” : “Vous y dansiez petite fille / Y danserez-vous mère-grand /C’est la maclotte qui sautille / Toutes les cloches sonneront / Quand donc reviendrez-vous Marie…” ou encore “Sous le pont Mirabeau coule la Seine / Et nos amours / Faut-il qu’il m’en souvienne / La joie venait toujours après la peine…”. Mais aussi Lou, celle des “Poèmes à Lou” : “Mon Lou je veux te reparler maintenant de l’Amour / Il monte dans mon cœur comme le soleil sur le jour…”. Ce sont les missives adressées à cette dernière, en prose comme en vers, qu’il nous est actuellement donné d’entendre au Lucernaire, portées par la lumineuse et incandescente Moana Ferré. Continuer la lecture

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Les jeux de guerre du 1er mai 1978

C’était en juillet 1978 à Avignon. J’avais envie de changer d’air après six mois d’armée somme toute éprouvants. Nous avions trouvé des places dans la cour du Palais des Papes pour la pièce «En attendant Godot» de Samuel Beckett. Michel Bouquet, Rufus et Georges Wilson habitaient cette scène pourtant immense. A ma manière, j’attendais aussi Godot et avec lui que vienne un monde. Quel monde ? Je ne sais pas. Que l’on vienne me chercher… Ce fut le cas, je me suis retrouvé en Allemagne. Continuer la lecture

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Plutôt mort que clivant

Jamais autant de monde n’a fendu autant de minéraux dans le sens naturel de leurs couches. Voilà une phrase dont on peut être sûr qu’elle n’a pas été prélevée en douce dans une liste de citations qui font mouche. Car elle correspond en effet à l’action bien rare de « cliver », du moins dans sa définition première. Et pourtant on voit le mot partout. Récemment dans l’actualité on pouvait lire un point de vue dans les colonnes de Paris Turf stipulant que le nouvel hippodrome de Longchamp était « clivant ». C’est ce que les orthophonistes appellent un mot-valise soit un vocable à tout faire pour les personnes ayant des difficultés d’élocution. Continuer la lecture

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Prochain rendez-vous le 30 avril

Le temps des vacances de Pâques, Les Soirées de Paris vont marquer une pause ainsi que l’image ci-contre l’illustre des plus finement. À chacune de ces occasions de reprendre un peu notre souffle, j’en profite pour remercier non seulement ceux qui contribuent ou ont contribué à la perpétuation de ce lointain titre de presse mais aussi les lecteurs (dont nous aimons les réactions, voire les corrections) de plus en plus nombreux. Continuer la lecture

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Le poète qui remuait ses globes sous un crâne de homard a trouvé son biographe

Il est bien loin le temps où Apollinaire envoyait ses témoins à Arthur Cravan pour l’avertir d’un duel s’il ne prononçait pas des excuses après avoir insulté l’artiste Marie Laurencin. Apollinaire comme Cravan étaient poètes et éditeurs de revues. Mais le deuxième était plus jeune et de surcroît boxeur. Ils sont tous les deux morts à l’automne 1918. Le premier a été fauché par la grippe espagnole. Le second est probablement mort noyé au large du Mexique. Si Apollinaire a été l’objet de maints ouvrages biographiques, ce n’est pas le cas du second. Le mal vient d’être réparé via une volumineuse bande dessinée. Continuer la lecture

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Restaurant bon et pas cher au goût d’ailleurs : Le Cambodge Montmartre (Paris)

Depuis la gentrification effrénée du quartier de Pigalle – Abbesses il est de plus en plus difficile d’y manger convenablement à un prix abordable. Les petits bistrots populaires font profil bas ou se transforment en gargote à touristes et usine à bobos. Si vous aimez les saveurs venues d’autres endroits du monde, les produits frais et si vous avez un appétit dévorant mais une bourse plate, voici l’une des bonnes adresses ayant pignon sur rue: le Cambodge Montmartre : des saveurs asiatiques, des portions généreuses, des produits frais et des prix légers. Continuer la lecture

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De Paul Celan à Nicolas Bouchaud, la poésie comme un méridien

«Le Méridien», dernier spectacle de Nicolas Bouchaud au théâtre du Rond Point, trace une ligne entre nos pôles et ceux d’un écrivain d’origine juive Paul Celan. Né en Roumanie, Paul Celan connaît la déportation et perd ses parents dans les camps. Traducteur et poète inlassable, il reçoit le prix Büchner et prononce à cette occasion un improbable discours de remerciement détourant tous les codes du genre pour se transformer en rêverie grave sur la poésie. Il y rend hommage à l’œuvre de celui qui donna son nom à l’illustre prix. Nicolas Bouchaud reprend ce texte, en 2018, pour en révéler la formidable puissance d’adresse et la force de jeu. Continuer la lecture

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La bataille d’Alger numérisée

Chaque semaine depuis le mois de décembre sort un produit journalistique original qui fait machine arrière toute sur la guerre d’Algérie. La focale choisie est intéressante puisque les événements sont relatés et commentés à travers les journaux de l’époque, en collaboration avec la BnF. Sous cellophane, accompagné d’un exemplaire du Figaro et de Alger Républicain, le premier numéro (« Le début de la guerre d’Algérie ») comportait également un film de Gillo Pontecorvo intitulé « La bataille d’Alger ». Ce long métrage sorti en 1966 n’a été autorisé qu’en 1971. Puis il connut des éclipses jusqu’en 2004 alors qu’il avait été couronné dès sa sortie au festival de Venise. Continuer la lecture

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Tous les Pessoas s’exposent à Madrid

En portugais, Pessoa signifie personne, dans le sens positif du substantif français : une personne, un être qui est là, tangible et vivant ; si loin, ce sens français, de son étymologie latine, per-sona, à savoir «masque d’un acteur», porte-voix, écran. Pessoa, c’est donc à la fois l’individu réel et son masque fictif. Et Fernando Nogueira Pessoa, né à Lisbonne en 1888, mort dans la même ville en 1935 d’une cirrhose du foie, fut à la fois un employé discret, un journaliste vibrionnant, un créateur inlassable et un poète multiple. Continuer la lecture

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