Peur sur la ville

Vu d’une rame de métro, ce visage déchiré est là pour vanter la sortie de « Ghostland », un « pur film d’horreur » programmé pour le mercredi 14 mars. Il traduit l’inquiétude et l’angoisse, ce qui est bien normal pour un genre destiné à faire peur. Incidemment, cette affiche offre en jouant sur l’effroi, un genre d’écho à une campagne récente visant à dénoncer le harcèlement dont sont victimes les femmes dans les transports en commun. Sauf qu’une fois de plus les communicants ont raté leur coup. Continuer la lecture

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Sempé and the Duke

Voilà Sempé de retour (à quatre-vingt six ans) dans l’actualité avec un double événement : sortie de son dernier album intitulé « Musiques », couplé avec une exposition de dessins originaux sur ce thème à la Galerie Martine Gossieaux, au cœur du faubourg Saint-Germain. En 2012, la galerie a fêté ses vingt ans passés à défendre avec amour Sempé, Bosc, Chaval, Savignac, Searle et bien d’autres. Après avoir réalisé l’album « Saint-Tropez for ever »(2010), ainsi qu’en co-édition avec Denoël « Sempé à New York » (2009), « Enfances » (2010, un autre regard que celui du Petit Nicolas), « Un peu de Paris et d’ailleurs »(2011), la galeriste me dit que ce cinquième album « Musiques » sera le dernier. Album et exposition nous révèlent un fou de musique, quoique pas n’importe laquelle. Continuer la lecture

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Une ville avec vue sur elle-même

Place de la Concorde, en voilà une qui n’a pas fini de tourner. Elle ravit les touristes mais pas les défenseurs du patrimoine rejoints pour l’occasion par la mairie de Paris au titre de la « sauvegarde » d’une « perspective historique ». Or il se trouve que dans son édition d’hier, Le Parisien a révélé un avis de justice passée inaperçu. Selon une décision du Tribunal administratif -très en forme ces derniers temps- il ressort que la « structure ajourée de la Grande roue n’obture pas la perspective allant du Jardin des Tuileries à l’Arc de Triomphe » et qu’au demeurant, cette perspective n’est en rien classée. Continuer la lecture

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Sombres éclipses

L’épisode pourrait avoir été fantasmé par des paranoïaques de la guerre froide ou par les grands maîtres du roman d’espionnage. Pourtant, l’enlèvement de – les chiffres divergent – plusieurs centaines de citoyens japonais, sud-coréens, européens, libanais,… par des agents nord-coréens dans les années soixante et soixante-dix est une réalité tout à fait authentique. Les officiels japonais ont mis près de 40 ans à l’admettre dès lors qu’ils ont été convaincus que le reniement pénalisait plus sûrement leur propre opinion publique que l’hypothétique normalisation des relations économiques avec la dictature de Kim Jong-un, asséchée par le boycott occidental. Continuer la lecture

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Le moyeu de la Sainte Ampoule

À son ami Fernand qui venait de soupirer qu’avec la domination de l’électronique le plaisir de oindre un pignon de vélo se raréfiait, il lui répliqua que de son côté mais dans un autre genre, c’était pareil: « Je n’obombre plus qu’à l’occasion et quand je le fais remarquer à ma femme, ça l’énerve, elle pense que je lui cache quelque chose ». Derrière son zinc, le patron qui en avait entendu bien d’autres, se contentait d’essuyer avec application un verre à bière pourtant sec de la veille. À l’autre bout du comptoir, sous sa casquette à pompon, un octogénaire trempait ses moustaches grises à la surface d’un ballon de blanc limé. Continuer la lecture

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Le bâtiment Morland transformé en robot-mixeur

La jolie tour Morland qui ne bouchait pas la vue est creuse. L’ancienne préfecture de police s’est vidée de sa substance humaine. Les parkings sont désertés. Ce petit coin tranquille du 4e arrondissement s’apprête à vivre l’épopée de la réinvention. Le programme s’annonce complet. Le projet confié à David Chipperfield Architects comprend à peu près tout ce qui fait l’esprit du temps, une auberge de jeunesse, un hôtel, des bureaux, des commerces, un laboratoire artistique et évidemment des espaces d’agriculture urbaines, sans lesquels semble-t-il aucune proposition ne saurait être retenue. Continuer la lecture

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Apollinaire expert dans « La Grâce et le maintien français »

« On ne juge bien du mérite de ses semblables que sur les apparences, souvent fort trompeuses, il faut bien le reconnaître… Quiconque veut occuper une situation doit s’assujettir aux exigences du code du savoir-vivre ». Tel est l’avertissement qu’un certain J. Molina da Silva adresse aux lecteurs de son livre publié en 1901  « La Grâce et le maintien français ». Aujourd’hui pratiquement introuvable (il a été longtemps absent des collections de la Bibliothèque Nationale), cet ouvrage de 130 pages dont l’auteur exerçait l’honorable profession de « professeur de danse et de maintien à l’Ecole spéciale militaire de St -Cyr » se veut un manuel de savoir vivre en bonne société qu’on relira un siècle plus tard avec un plaisir distancié. Continuer la lecture

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L’objet change de mains

Sur un buste féminin de céramique blanche, Jeanne Rimbert a déposé une coiffe évoquant fortement de la viande sortie du hachoir.  Son projet « Hurted » (blessée) est une interrogation violente sur la femme d’aujourd’hui laquelle serait encore prisonnière d’un patriarcat plurimillénaire. Sa déclinaison sanguinolente, bras tranchés, aux antipodes d’une couverture de Vogue, se donne à voir dans le cadre d’une exposition organisée par « Mémoire de l’avenir » du côté de Belleville. Continuer la lecture

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Phantom Thread ou le fil fantôme

Je ne pense pas avoir jamais vu au cinéma une telle scène de coup de foudre entre les deux principaux protagonistes, à la fois totalement incroyable et totalement convaincante, typique de l’ambiguïté dans laquelle le cinéaste plonge ses personnages – et les spectateurs – tout au long du film « Phantom Thread ». Nous sommes dans un restaurant de la campagne anglaise, où s’arrête le grand couturier londonien des années 50, Reynolds Woodcock (jeu de mots pour les initiés !), avant de rejoindre sa propriété pour prendre quelques jours de repos.
Auparavant, au cours de leur petit déjeuner rituel, nous avons vu sa grande sœur Cyril (qu’il appelle mi affectueusement, mi ironiquement, « my old so and so », « ma vieille machine »), lui recommander de s’accorder ce break. Continuer la lecture

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En compagnie de Victor Hugo et de Jacques Ibanès

En 1839, Victor Hugo se promène dans le sud de la France avec sa compagne Juliette Drouet. Ils ont la chance de faire du tourisme, un mot encore très rare dans un pays où le labeur rural est toujours dominant. Au mois d’octobre ils passent en diligence devant la montagne Sainte-Victoire sans que cela ne les émeuve particulièrement. Cézanne n’a pas encore peint des dizaines de fois son sujet préféré. C’est en partant de cette information en creux que l’écrivain Jacques Ibanès vient de publier « Victor Hugo n’a pas vu la Sainte-Victoire ». Continuer la lecture

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