Pour une maire écologiste poitevine, les premières images du film « Le vent se lève », de Hayao Miyazaki, seraient proprement insoutenables. On y voit un petit garçon dormir près de sa petite sœur. Et voilà que ce polisson, peu au fait des enjeux environnementaux, se met à rêver éveillé. Il grimpe sur le toit de la maison familiale et rejoint un avion miniature juché sur un mât. Quelques tours de manivelle plus tard, avec sa casquette à visière et ses lunettes de protection, le voilà filant dans le vent qui « se lève » dans un de ces paysages à haute densité poétique qui font la caractéristique du maître de l’animation japonais. Il croise aussi dans le ciel des engins de guerre car Miyazaki ne fait pas pour autant dans l’angélisme béat. Sorti en 2013, « Le vent se lève » n’est pas le premier film où il laisse libre cours à sa passion de l’avion qu’en japonais l’on nomme hikouki. Continuer la lecture
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En 2021, avec le recul, cela paraît invraisemblable. Quoique notre époque devrait nous conduire à ne plus nous étonner de rien. Ce protège-cahier d’après guerre (la seconde) était en effet ni plus ni moins sponsorisé par le rhum Negrita. Apparue à Limoges une centaine d’années auparavant, la marque trouvait tout naturel d’orner la couverture du protège-cahier avec dessin humoristique vantant son produit phare auprès des élèves de l’école primaire, mais aussi en dernière page en stipulant que la boisson se devait d’appartenir à « toutes les familles de France ». On imagine sans peine le tollé qu’une telle initiative déclencherait aujourd’hui. Mais au milieu du 20e siècle, apparemment personne n’y retrouvait à redire d’autant que c’était gratuit et que figuraient dans les pages intérieures des choses tout à fait sérieuses comme les grandes dates de l’histoire de France ou encore les tables de multiplication. La marque s’insinuait partout y compris dans deux des trois modèles d’écriture, « La bâtarde » et « La ronde ».
On ne peut pas dire que Geneviève Marguerite Marie-Louise de Pillot de Coligny, dite « Lou » et amante hautement inflammable de Guillaume Apollinaire, n’avait pas conservé quelque lien avec la religion chrétienne. Au moins dans une lettre postée depuis Marseille (1) le 29 mars 1915, après avoir déjeuner chez Basso, elle écrit à son amant canonnier conducteur à la caserne de Nîmes, qu’elle va tâcher de monter à Notre-Dame de la Garde prier pour « ce qu’elle aime ». Mais on peut affirmer en revanche, qu’elle s’était dans la vie, bigrement éloignée des préceptes de la mère supérieure du pensionnat des Dames de Saint-Maur à Vesoul. Selon ses recommandations que nous avons retrouvées et plus précisément les « conseils pour les vacances », il y avait en effet comme un contraste. Il fallait en effet aux élèves, craindre « le trop de bien-être, l’oisiveté » ou encore « les amitiés sensibles ».
Avec la «Carmen» de Georges Bizet, le «Faust» de Charles Gounod demeure l’un des opéras français les plus joués au monde. D’un côté le mythe de la femme libre, de l’autre celui de la jeunesse éternelle, avec un livret inspiré d’une légende allemande moyenâgeuse et de deux poèmes dramatiques de Goethe («Faust I» en 1808 et «Faust II», publication posthume en 1832) : le très savant docteur Faust ne supporte plus son grand âge, et décide de vendre son âme au diable pour retrouver la jeunesse et ses plaisirs.
Le 25 mars dernier, la Grande Faucheuse mettait tristement le réalisateur Bertrand Tavernier (25 avril 1941 – 25 mars 2021) à la une de l’actualité. Le cinéaste à l’importante et éclectique filmographie très appréciée fit l’objet d’un éloge unanime et son œuvre fut, comme il se doit, largement commentée. L’homme était également très estimé. Cinéphile passionné et passionnant, il n’avait de cesse de transmettre son amour du cinéma. Et c’est justement plongée dans sa série des “Voyages à travers le cinéma français” que l’auteure de ces lignes apprit sa disparition, ne pouvant réellement y croire puisque l’homme lui parlait la veille encore par écran interposé. Avec Bertrand Tavernier, admirable conteur, le cinéma était une histoire bien vivante qui perdurerait à travers les générations.
Le 22 octobre, il y aura cent ans qu’il a vu le jour, à Sète. Le chiffre rond attirant le couillon, sa ville natale organise, par conséquent, une année Georges Brassens, avec moult concerts, colloques et expositions. En près d’un demi-siècle, cet artiste un peu spécial est passé de l’état de quasi clodo au sommet des ventes, croulant sous les disques d’or, raflant les distinctions, primé par l’Académie française, intronisé poète majuscule. Le jeune anar mal dégrossi s’est transmué, avec l’âge, en une sorte de sage tutélaire, pipe rassurante, velours côtelé, bacchantes grisonnantes. Puis, à titre posthume, il est devenu une sorte d’institution, roulé dans la révérence, visité tel un monument, embaumé classique, indiscutable.
Il est temps de découvrir en France Kelly Reichardt, star du cinéma indépendant US, qui s’est imposée discrètement en sept longs métrages au cours des quelque vingt-cinq dernières années. Tournant tranquillement de «superbes films fauchés dans l’Amérique rurale» (selon la formule du site «troiscouleurs.fr»), elle a peu à peu bâti ce qu’on appelle une œuvre au niveau des plus grands. Elle est même sans doute la seule vraie révélation du cinéma US de ces dernières années.
L’actualité fait parfois preuve d’une simultanéité porteuse de sens. Dans sa dernière livraison cette semaine, Le Figaro Littéraire publiait un dossier sur la disparition de la poésie française. Juste auparavant, une dépêche de l’AFP nous apprenait que le trou noir logé au cœur de la galaxie Messier 87 (M87), situé à des millions d’années-lumières du boulevard Saint-Germain et découvert en 2019, commençait à livrer des renseignements sur son activité. C’est peut-être par là qu’il faut chercher. Sachant en effet qu’un trou noir avale d’énormes quantités de matière avec le même manque de discernement qu’une autruche subsaharienne, on pourrait dire que la poésie française a été tout bonnement escamotée, au-delà de ce que les scientifiques appellent « l’horizon des événements », c’est à dire un genre de limite extrême avant le grand saut quantique.
Le 26 octobre 1938, en fin de journée, John Steinbeck peut enfin poser son stylo. Il vient d’achever sans aucun doute l’un des plus grands romans de tous les temps, « Les raisins de la colère ». Sa femme Carol a produit le tapuscrit en parallèle. La rédaction avait débuté en juin. Et non seulement dans ce court laps de temps il a produit un travail colossal mais il a, en parallèle, rédigé le journal de ce labeur. Ce 26 octobre pour ne rien arranger, il souffre d’une grippe intestinale, sans compter plusieurs gueules de bois cumulées. Et ses derniers mots sont: « J’espère que c’est bon. » Le prix Pulitzer, obtenu l’année suivante achèvera de dissiper ses doutes. Ce journal a été publié une première fois en 1989, traduit chez Seghers en 2019 et il vient de paraître en petit format dans la collection Pavillon Poche chez Robert Laffont.
Pour son centième anniversaire (c’est en 1920 qu’un journaliste inspiré les baptisa sous ce titre), le «Groupe des Six» n’a guère suscité de commémoration ou de rétrospective particulière. Voilà qui constitue une raison suffisante pour mettre en avant l’étude que lui a consacrée Pierre Brévignon dans un ouvrage paru chez Actes-Sud il y a quelques mois : «Une histoire des années folles» . Les Russes avaient leur Groupe des Cinq : au XIXe siècle, Balakirev, Rimski-Korsakov, Borodine, Moussorgski et César Cui revendiquaient le retour aux racines nationales, se référant essentiellement aux préceptes de Glinka. «Il ne peut y avoir de musique que nationale», dit en substance Rimski-Korsakov. En France, le «Groupe des Six», qui apparaît à la fin de la première guerre mondiale est loin d’être aussi structuré et homogène. Il faut faire appel à l’agitateur d’idées qu’était déjà Jean Cocteau, pour trouver à ces fortes personnalités une inspiration commune et un semblant d’unité. Ils s’appellent Georges Auric, Louis Durey, Arthur Honegger, Darius Milhaud, Francis Poulenc, Germaine Tailleferre.